🔷 La science à fleur de Po



17 mars 2020 /// L’actu de la profession
On choisit
sa famille

Islamoquoi. La question brulante de l’islamogauchisme et des domaines de recherche (décolonialisme et tutti quanti) qui y seraient liés (conditionnel de rigueur) m’en fait m’en poser une autre, que je vous livre.
Si loins, si proches. Si cette polémique a enflammé les sciences humaines (sociologie, anthropologie…), elle n’a — tout comme les débats autour de la loi Recherche — que peu attisé les sciences dures.
Le grand fossé. L’incompréhension ne date pas d’hier, comme l’a théorisé le chimiste à tête d’écrivain Charles Percy Snow dans ce papier fondateur : The Two Cultures, paru en 1959, qu’il faudrait lire une bonne fois pour toutes.
La vie, mode d’emploi. En proposant une « enquête » sur l’islamogauchisme, la biologiste Frédérique Vidal cède à la tentation quantitative (qui, combien, où), en oubliant le pourquoi et le comment.
Et à la fin… Et pourtant, comme le prédisait CP Snow (pas Jon, qui ne sait rien), la réconciliation des deux familles est tout simplement une des conditions de la survie de nos démocraties.

Keep calm & science hard,
Laurent de TheMetaNews


Si vous n’avez que 30 secondes



A partir d’ici 5 min de lecture addictive


Le CNRS aux ordres alphabétiques


La classement des admissibles de A à Z et non plus au mérite fait réagir.


Fera-t-il bon s’appeler Zwierkowski?
Travail posté. La question agite les instances du CNRS : comment classer les listes des admissibles aux postes de chargés de recherche suite aux recos des sections ? Réponse de la direction depuis le 04 mars : par ordre alphabétique et non plus par ordre de mérite. La liste par ordre de mérite resterait accessible sur demande mais devrait rester confidentielle.
Ca change tout. Cette manière de donner la main au second jury d’admission, plus institutionnel, passe mal auprès des syndicats et des chercheurs. La polémique survient sur fond de préparation aux élections du Comité national de la recherche scientifique pour 2021 à 2026, le « parlement » du CNRS. Du côté de la direction, c’est pour l’instant « no comment ».
 Happy (too) few  Régulièrement attaqués en justice (voir un exemple récent) — les recrutements au CNRS (en diminution au fil des années) ont toujours une charge symbolique forte. Pourtant, avec 239 postes en 2021, ils ne représentent qu’une part minoritaire des postes mis au concours.


 Des infos en peu de mots  Un an et demi après sa naissance, le rapport d’activité de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche est sorti (il n’y est pas question d’islamogauchisme) ////////// Plus lègère que l’air, la Fédération de recherche Hydrogène du CNRS a été lancée le 09 mars dernier ////////// La France n’est pas un cador des appels d’offre européens tel Horizon Europe : pour tenter d’en tirer le meilleur parti (plus de sous, soyons clair), le ministère lance un plan idoine //////////


La science à fleur de Po


Islamogauchisme, épisode… On a arrêté de compter mais on récapitule.


 Si vous avez raté le début  L’islamogauchisme gangrène-t-il l’université ? Frédérique Vidal le pense. Elle a annoncé commander une enquête sur le sujet et tente depuis de rasséréner les chercheurs. Reste à savoir à qui passer commande : le CNRS botte en touche (mais n’exclut pas de participer), l’Alliance Athéna se déclare incompétente, le Hcéres garde le mystère (lire la fin de notre interview) et la piste de l’Inspection générale n’est pas confirmée par le ministère.


Atterrissage forcé. Si personne ne sait ce qu’est l’islamogauchisme (à part une injure publique, peut-être), ses effets se font pourtant sentir dans l’ESR. La diffusion par un certain Philippe Boyer d’une liste des 600 gauchistes complices de l’islam radical le 21 février (un décalque des signataires de cette pétition) a été suivie d’effets. Les chercheurs visés ont été contactés par leurs employeurs (exemple ici d’une lettre du CNRS le 05 mars) au cas où…
Ebullition mentale. Mais c’est le cas de Sciences po Grenoble qui occupe tous les esprits depuis l’affichage (non revendiqué) aux portes de l’institut de deux enseignants, Vincent T et Klaus Kinzler, accusés d’islamophobie. Des placards relayés sur les réseaux sociaux par l’Unef (qui l’a vite regretté), syndicat précisément accusé d’islamogauchisme.
 En mémoire de Samuel   Il est bon de replonger dans l’affaire comme l’a fait Mediapart. Elle prend ses racines dès fin 2020 autour d’un groupe de travail « Racisme, islamophobie, antisémitisme » où les deux enseignants d’allemand contestaient l’emploi du mot islamophobie, face à une chercheuse spécialiste de ces sujets. Voilà pour la politique. Mais de science, il ne sera pas question.


Premier comptage

Il ne s’agit évidemment pas d’une enquête à proprement parler mais le chercheur Albin Wagener a publié sur son blog une recherche sémantique avec quelques termes « décolonial », « intersectionnel », etc sur les principales bases académiques (HAL, Theses.fr, Cairn, OpenEdition). Disons le vite : ses résultats tendent à prouver que ces domaines de recherche sont ultra minoritaires en France.


 Le Journal officiel au pas de charge  Le cahier des charges de l’appel à projets « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène » est modifié et celui du concours d’innovation i-Nov est approuvé //////// Mais qu’est-ce qu’un acanthosome ? La Commission d’enrichissement de la langue française y répond //////// 


 Ils actualisent leur CV  Les membres du conseil d’administration de l’Agence nationale de la recherche ont été nommés (et c’est un who’s who de la recherche française//////// Nicolas Chailler est chargé des fonctions de directeur général de la recherche et de l’innovation par intérim, suite au départ anticipé de Bernard Larrouturou en novembre. Ce dernier a depuis rejoint l’Hcéres à l’évaluation des organismes nationaux de recherche //////// Carole Bousquet-Bérard est nommée conseillère santé, solidarités, protection sociale (cheffe de pôle) auprès de Jean Castex //////// Les places de directrices ou directeurs de l’école d’ingénieurs Sigma Clermont, de Polytech Clermont, de l’Isima, de Clermont Auvergne INP et de Phelma sont déclarées vacantes //////// Deux nominations à l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (Igesr) //////// 


Et pour finir


Cette vidéo à la fois fascinante et — avouons-le — un peu effrayante d’une tête de limace de mer essayant de rejoindre son corps, on la doit à une chercheuse japonaise, Sakaya Mitoh qui l’a initialement publiée dans Current biology (via New York Times).