Levez la main droite et dites…

Un serment pour les médecins, les pharmaciens, les avocats… et maintenant les chercheurs ? On fait le point.

— Le 2 avril 2021

Culpabilité. Faire prêter serment aux chercheurs ? L’idée n’est pas nouvelle. Après la seconde guerre mondiale, la responsabilité morale du chercheur est très présente dans ces discussions, comme en atteste Karl Popper en 1971. Pour le physicien Józef Rotblat, qui a travaillé sur le projet Manhattan avant de militer contre les armes nucléaires, un serment, d’une portée avant tout symbolique, pousserait les jeunes chercheurs à réfléchir aux conséquences de leurs travaux.

Du concret. Le monde francophone n’est pas en reste : en 1993, l’École polytechnique fédérale de Lausanne lance le serment d’Archimède qui décline en dix points ce thème de la responsabilité morale. Le philosophe Michel Serres et l’astrophysicien Pierre Léna ont eux proposé dans un texte aux accents lyriques que les scientifiques jurent de dévouer leurs travaux « à l’égalité entre les hommes, à leur survie, à leur élévation et à leur liberté ».

Collectif avant tout. Cette vision est loin de faire l’unanimité. Une grande partie des chercheurs n’acceptent pas que l’on les tienne pour responsable des applications issues de leurs travaux — qui devraient faire l’objet de réglementations collectives. Ceci explique entre autres pourquoi l’idée d’un serment a toujours mauvaise presse au sein de certains syndicats, qui y voient une menace pour l’indépendance des chercheurs.

Peur de la censure. Il y a 20 ans, les sociétés savantes américaines se réunissaient pour débattre de l’idée du serment sans se mettre d’accord. Leurs conclusions : s’il est un bon point pour l’image des scientifiques dans la société (c’est également l’avis de Frédérique Vidal), le serment pourrait devenir un outil de censure des libertés académiques. Les actuels débats autour de la loi de bioéthique ou de l’islamogauchisme ne rassurent personne. 

Toujours bon d’en parler. Malgré leur impossibilité de s’accorder sur la formulation d’un serment, les sociétés savantes américaines actaient toutefois l’utilité de ces réflexions. On fait le pari qu’il en sera de même en France.

Un serment pour l’intégrité

L’idée de prêter serment renaît aujourd’hui avec un objectif : défendre l’intégrité scientifique. Il servirait aussi de protection aux jeunes chercheurs face à l’injonction du « publish or perish ». Ce sont « des postdocs en biologie désemparés face à leurs chefs d’équipe » qui ont poussé le sénateur Pierre Ouzoulias, lui-même chercheur, à légiférer pour leur permettre « une sorte de clause de conscience ». L’article 18 de la loi recherche précise ainsi que le futur texte du serment engagera le candidat à « respecter les principes et les exigences de l’intégrité scientifique ». « Il pourra donc difficilement être détourné », rassure le sénateur. Enfin, plus techniquement, le texte du serment sera défini par arrêté, plus léger et facile à modifier qu’un décret.

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