EMPREINTE CARBONE
Réduire leurs émissions ? Les chercheurs sont prêts à le faire, ils n’attendent qu’une chose : qu’on les y oblige.
▶ Unanimes. Pensez-vous que l’urgence climatique exige des changements profonds dans la pratique de nos métiers ? À cette question, une écrasante majorité (88%) de chercheurs répond oui. Les premiers résultats de cette enquête menée en 2020 auprès de 6000 d’entre vous avaient été publiés en janvier 2021 par Labos1point5.
▶ Colibris. « Les chercheurs sont prêts à faire des sacrifices », commente Marianne Blanchard, co-autrice de ce rapport d’interprétation. En effet, 92% des répondants de l’enquête pensent que la recherche doit réduire ses émissions d’un tiers ou plus d’ici 2030, comme la France s’est engagée à le faire.
▶ Dans les nuages. Néanmoins, « ils n’ont pas forcément en tête les ordres de grandeur des émissions liées aux différentes activités et donc ne savent pas où faire des efforts », nuance la sociologue. Si l’on parle beaucoup de l’avion, il s’agit bien de la première source d’émission dans la recherche : 58% des répondants ont pris l’avion en 2019 alors que dans les professions de même niveau, la moyenne est d’un sur cinq, toujours selon le rapport.
▶ Dissonance. Plus de la moitié des répondants se déclare prêt à diminuer ses vols d’au moins un tiers même si les chercheurs ne se sentent pas forcément libres de le mettre à exécution : « On observe une contradiction entre les volontés individuelles et les cadres collectifs et institutionnels », analyse la sociologue.
▶ Cadeaux de Noël. Malgré leur apparente bonne volonté, les chercheurs cèdent donc aux injonctions de visibilité internationale et de productivité. Le système actuel pousse de surcroit à la surconsommation : afin d’utiliser les reliquats de budget non reportables, certains achètent du matériel informatique (20% des répondants) ou des billets d’avion (5%) qui ne sont pas indispensables.
▶ Dictature verte. L’étude propose donc des mesures simple comme l’interdiction de l’avion si le voyage en train dure moins de six heures ou l’établissement d’un quota de vols par personne et par an. « Pour la plupart, ces mesures ne semblent pas rencontrer d’opposition de la part de la communauté », observe Marianne Blanchard.
▶ Expéditions polaires. « Une mesure est cependant moins approuvée : celle d’instaurer comme critère d’attribution des financements le bilan carbone des projets », précise-t-elle. Une telle mesure serait en effet perçue comme pénalisante pour les missions sur des terrains éloignés, ou nécessitant l’usage de matériel fortement émetteur.