Piégées par l’excellence

13.09.2024 • LA RECHERCHE ET SA PRATIQUE


Raviver la flamme

Où sont les femmes ? La question tourne en boucle depuis des années et les statistiques ne progressent pas : on compte toujours un tiers de femmes parmi les chercheurs. Ni plus ni moins.

Avec leur rire. Au-delà de leur nombre, c’est aussi leur quotidien qui importe : leur genre, socialement construit, les poussent à s’acquitter de certaines tâches parfois délaissées par leurs collègues masculins.

Plein de larmes. Comment y remédier ? Pas en jouant la carte de l’excellence, argumente l’historienne Fanny Gallot. Son interview est à lire cette semaine, et elle n’a pas perdu… la flamme.

Bonne lecture, 
— Lucile de TheMetaNews

Sommaire

→  INTERVIEW  Les femmes victime de l’excellence, selon Fanny Gallot
→  OUTIL  Des revues pour vos données
→  CHIFFRE  Les équipes grossissent…
→  EXPRESS  Votre revue de presse
→  ET POUR FINIR Pour de rire

TEMPS DE LECTURE : 5 ou 10 MINUTES

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INTERVIEW

« Les critères d’excellence sont profondément genrés »

Historienne à l’université Paris-Est Créteil, Fanny Gallot s’est penchée sur la question des femmes dans la recherche et sa dimension politique.

Photothèque Rouge / Copyright : Martin Noda / Hans Lucas

La promotion de l’excellence ne permet-elle pas aux meilleures d’y arriver et de stopper l’effet Matilda ?

   ↳ Aujourd’hui en France, trois éléments matérialisent les politiques d’excellence : la quantification et l’explosion de la production scientifique, les appels à projets, ainsi que l’internationalisation. Trois éléments pour lesquels les inégalités de genre sont criantes. Sur la production scientifique, on a réalisé à la sortie du Covid à quel point des hommes avaient pu profiter de ce moment particulier pour publier, écrire des ouvrages… alors que les femmes beaucoup moins (…)

OUTIL

Des revues pour vos données

DataGueule.Data papers, vous avez peut-être déjà entendu ce mot mais qu’est-ce exactement ? Il s’agit d’« un article scientifique évalué par les pairs et citable [qui] décrit un jeu de données, la méthode ayant permis de l’obtenir et le potentiel de réutilisation de ce jeu », explique le CoopIST du Cirad dans une fiche dédiée. Ces trois points constituent en général la structure de la publication, qui ne comporte ni discussion ni conclusion autour de résultats de recherche. Dans quelle type de revue publier ? Le même service publie une liste de plus de cent revues pour les data mais aussi software papersdans treize domaines couverts par le Cirad, allant de la biologie à l’économie. Une précédente liste datant de 2022 existe sur Zenodo et, si vous êtes sceptique, l’économiste Victor Gay explique pourquoi, pour qui et comment publier un data paper en SHS.

EXPRESS

Pendant ce temps dans les labos

● Instant agenda. Le Fête de la science s’organise dans toute la France du 4 au 14 octobre  sur le thème “Océans de savoirs”. Aux mêmes dates et peut-être un peu moins connues : les visites insolites du CNRS. Les 10, 11 et 12 octobre se dérouleront à Lyon les Journées de savoirs engagés et reliés, pour celles et ceux qui veulent agir pour un monde plus écologique et solidaire. Quant au festival de science-fiction les Utopiales, il aura lieu à Nantes du 30 octobre au 3 novembre 2024. La billetterie a ouvert hier jeudi 12 septembre, dépêchez-vous !

● Ouvert à la critique. Le mouvement de la science ouverte va bientôt être doté d’un observatoire international : l’Open science monitoring initiative, dans lequel l’Université de Lorraine est particulièrement impliquée. Une ébauche des grands principes a été soumise à l’Unesco en avril dernier. Vous pouvez envoyer vos remarques jusqu’en novembre 2024.

● À la loupe. Notre interview du jour vous a donné envie d’étudier l’impact de la moindre présence des femmes dans la recherche, les biais de genre ou les choix d’orientation ? Vous pouvez candidater à l’appel à projet de la chaire Femmes et science (Unesco et Université Paris Dauphine-PSL) avant le 27 septembre.

  Mais aussi…   Ceci est une révolution : Zotero sort sa version 7, la plus importante mise à jour en 18 ans selon les créateurs, avec une nouvelle interface ● Intégrer des non-scientifiques dans les comités éditoriaux ? Le célèbre BMJ le fait depuis dix ans avec des patients, une pratique que toutes les revues médicales devraient adopter selon La Rédaction médicale ● Un édito dans Science revient sur l’importance de protéger les chercheurs, que ce soit leur liberté académique aussi bien que leur santé mentale, et rappelle le lancement d’un programme dédié par l’Unesco ●

CHIFFRE

1,8

La taille des équipes de recherche a augmenté d’un facteur 1,8 entre 1970 et 2004, révèle une étude publiée dans Nature biotechnology. Les auteurs ont analysé le parcours de doctorants ayant soutenu aux États-Unis entre 1969 et 2004, aussi bien en physique qu’en sciences sociales. La composition des équipes a également évolué, avec une augmentation nette du nombre de non-permanents. Le phénomène dessert les jeunes chercheurs, diminuant leur probabilité d’obtenir plus tard un poste plus stable. L’évaluation, qui reste très individuelle alors que le travail est souvent collectif, serait peut-être à revoir, selon les auteurs.

EXPRESS

Votre revue de presse

→ Avec AR. Et si la dispute scientifique arrivait devant les tribunaux ? Le phénomène semble prendre de l’ampleur avec la lettre d’intimidation qu’a reçu le physicien Raphaël Lévy d’un ponte américain dont il a osé critiquer les travaux. Nous vous mentionnions l’article de Retraction Watch à ce sujet avant l’été, Le Monde écrit dessus cette semaine ↯.

→ Darwin au Louvre. Quel est le point commun entre une université et un musée (outre les portraits de vieux barbus) ? Les deux cherchent à protéger leur image face aux lanceurs d’alerte. Un phénomène que regrette le biologiste David Sanders dans les colonnes de Times Higher Education.

→ État civil. Encore un problème auquel les femmes sont confrontées : lors d’un mariage (ou d’un divorce), certaines changent de nom de famille et toutes leurs publications n’apparaissent pas forcément en même temps. C’est le cas sur PubMed, plateforme de référence en biologie et santé… Une action en justice est en cours, selon une brève de Science.

→ Sherlock Holmes. Votre collègue espagnole Maria Ángeles Oviedo‑García a remarqué des phrases étranges dans des rapports de peer review. Elle a donc étudié plus de 250 d’entre eux – principalement dans des revues de MDPI – et conclut à l’activité de véritables review mills, qui vendent de faux rapports. Science raconte.

→ Le malheur des uns… Outre-Atlantique, la rentrée est marquée par la fin de la discrimination positive dans les universités américaines. Au MIT, la part d’étudiants noirs et hispaniques a notablement chuté, au profit des étudiants d’origine asiatique. L’économiste et lauréate du prix Nobel dans la discipline Esther Duflo signe une chronique sur France Culture.

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POUR DE RIRE

Et pour finir…

Le Monopoly, vous en avez fait le tour ? Place au Publish or Perish !