
15.10.2025 • N° 539 • LA RECHERCHE ET SA POLITIQUE
Philippe Aghion superstar
Ô rage. Les scientifiques se plaignent souvent — à raison — de ne pas être écoutés des politiques. La séquence autour de la loi Duplomb qui a fait fi de nombreux résultats de recherche n’en est qu’un exemple récent.
Pensum. Il est pourtant une discipline commensale de nos puissants : l’économie, dont les personnalités et les résultats irriguent la pensée politique. Philippe Aghion, penseur de la « destruction créatrice », tout juste nobélisé, est l’un de ces scientifiques influents.
Tutoyer les sommets. Lui qui a reçu le 6 octobre, en pleine tempête institutionnelle, l’ordre du Mérite des mains d’Emmanuel Macron après en avoir été le conseiller économique en 2017, était également aux premières loges lors de la remise du rapport Draghi en septembre 2024.
Plus égaux que les autres. Plutôt que de relations science & société, il faudrait donc plutôt parler de relations sciences & société, au pluriel. C’est justement la thématique de notre interview du jour d’Hervé Dole, par Noémie Berroir.

Bonne lecture,
— Laurent de TheMetaNews
Sommaire
→ INTERVIEW Science, société et maintenant ? Hervé Dole répond
→ EXPRESS Le Palais et Sébastien Lecornu en sursis
→ LA VIE DE L’ESR Le JO réduit à sa plus simple expression
→ EXPRESS Votre revue de presse
→ ET POUR FINIR Marie en double
TEMPS DE LECTURE : 6 ou 12 MINUTES |
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INTERVIEW
« Il ne faut pas revenir en arrière sur nos promesses »
Fin de cycle pour la politique Science-société : Hervé Dole, vice-président de l’université Paris Saclay, appelle à un sursaut sans mâcher ses mots.

Il y a quelques semaines pourtant, le réseau des VP Science & société — aux côtés de France Université — s’inquiétait de la disparition des dispositifs SAPS ainsi que de la labellisation. Quelles sont vos craintes ?
↳ Nous savions dès le départ que ces labels n’allaient durer que trois ans et ce pour trois vagues différentes. Cette fin des financements est évidemment douloureuse mais nous pourrions la qualifier d’happy ending étant donné ce que nous avons réussi à construire. Cependant, lorsqu’une démarche aussi ambitieuse et efficace arrive à son terme, cela implique de la poursuivre sous une autre forme — ce qu’on nous laissait entendre au début (…)
EXPRESS
Pendant ce temps-là dans la recherche
→ Bis repetita. Nos pronostics étaient les bons : Philippe Baptiste a été reconduit dans le gouvernement Lecornu 2 avec quelques péripéties : il a même été promu en tant que ministre de plein exercice à l’Enseignement supérieur, à la Recherche et à l’Espace. Elisabeth Borne, ex ministre de l’Éducation et de l’ESR quitte elle le gouvernement. Le siège de Philippe Baptiste est toujours éjectable, puisque le gouvernement Lecornu 2 est toujours suspendu à une éventuelle motion de censure. Le Premier ministre a déclamé hier son discours de politique générale et le projet de loi de finances pour 2026, enjeu de toutes les tractations, a été présenté hier à la presse et au monde. Le voici d’ailleurs, divulgué par nos confrères de Contexte. Pendant ce temps, Philippe Baptiste a réservé le premier déplacement de son nouveau mandat à l’un de ses dadas, l’espace, puisqu’il était au siège d’ArianeGroupe aux Mureaux (Yvelines) le 13 octobre •
→ Clair obscur. Après plusieurs mois d’incertitudes, l’avenir du Palais serait-il enfin fixé ? Dans un article daté du 1er octobre, L’Express affirme qu’il devrait bien retourner dans les locaux du Palais d’Antin ↯ et conserver les huit galeries envisagées — qui ne seront plus exclusivement dédiées à l’exposition permanente mais devront également abriter des expositions temporaires. Autre grande nouveauté : le RMN-Grand Palais « sera chef de file pour la gestion du bâtiment, pour la billetterie mais aussi pour l’ensemble des contenus », peut-on lire dans l’article. Lui attribuant ainsi un droit de regard sur ce qui sera produit par le palais de la Découverte. Du côté des personnels de l’établissement, ce potentiel retour au sein du Palais d’Antin ne les rassérènent pas. Malgré les nouvelles de L’Express, eux n’ont eu aucun retour officiel de leurs tutelles et le droit de regard qu’aurait le RMN-Grand Palais sur leur contenu inquiète. Le 12 octobre, à l’occasion de la Fête de la science, certains médiateurs ont donc réalisé une action — à visionner ici — pour rappeler le danger qui guette le Palais de la Découverte et relancer la pétition de juin dernier •
→ Infos en vitesse. DésUMRisation, suite : les personnels du CEPEL (Centre d’études politiques et sociales) de Montpellier dénoncent le désengagement du CNRS. Une décision conjointement « déplorée » par l’Association française de sciences politiques • L’association pour la liberté académique (Alia) prend elle la défense de l’universitaireMathias Rollot, mis en cause par l’agence d’architecture Chartier-Dalix pour un article critique dans la revue Lundi Matin •

EXPRESS
C’est la vie de l’ESR
→ Le JO au pas de course. Quelques sanctions du Cneser disciplinaire (relisez notre dernier numéro de Comparutions) •
→ Ils réimpriment leur carte de visite. Philippe Baptiste est donc renommé ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Espace • Des nominations de professeurs des universités via le concours national d’agrégation dans les disciplines droit public mais aussi en science politique • Des nominations de professeur des universités titulaire ici et là • Marjolaine Chiriaco est nommée membre du conseil d’administration du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) comme représentante suppléante du ministre chargé de la Recherche, en remplacement de Anne Puech • Jean-François Huchet, président de l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), El Mouhoub Mouhoud, président de l’Université Paris sciences et lettres (PSL) et Christine Neau-Leduc, présidente de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne sont nommés membres du conseil d’administration de Campus France • Christophe Bident, professeur des universités, est nommé directeur de l’Institut national supérieur du professorat et de l’éducation de l’académie d’Amiens au sein de l’université d’Amiens •
EXPRESS
Votre revue de presse
→ Non sens. Suite à la signature d’un décret de Donald Trump qui désigne le « mouvement antifa » comme terroriste, Mark Bray, professeur à l’université Rutgers, dans le New Jersey et historien de l’antifascisme, a reçu de nombreuses menaces de mort, le contraignant à quitter le pays. Mediapart fait le point sur sa situation ↯. À l’heure où la liberté académique est menacée outre-Atlantique, TheConversation revient sur les origines et l’histoire de ce concept.
→ Fin de bee. Au moment où la loi Duplomb relançait les débats autour de l’utilisation de pesticides, l’Inrae a fait le choix de fermer l’unité expérimentale Apis — pour Abeilles, paysages, interactions et systèmes de culture — dédiée aux abeilles, rapporte Reporterre. Une décision « incohérente et totalement anachronique » contestée par la section CGT qui défend les agents concernés.
→ Tête à têtes. « La science est essentielle dans notre démocratie » : Dans un grand entretien à L’Express, la directrice générale de l’École polytechnique, Laura Chaubard, et le président de Sciences Po, Luis Vassy, se projettent dans le futur ↯ et s’intéressent à l’avenir de l’enseignement supérieur.
→ Grand froid. Alors que l’administration américaine est bloquée depuis le 1ᵉʳ octobre par l’absence d’un accord sur le budget 2026 au Sénat, des milliers de scientifiques directement employés par le gouvernement fédéral ont été expulsés de leurs laboratoires mettant en suspens leurs projets de recherche, rapporte Science. Sur le même sujet, vous pouvez également (re)lire notre analyse sur cette équipe de physiciens américaine mise à la porte de leur institut pour raisons budgétaires. De son côté, l’un des lauréats du prix Nobel de physique 2025, John Clarke, déplore les coupes budgétaires drastiques ↯ opérées par l’administration Trump qui paralysent la science, rapporte le média suisse Le Temps.
→ Attention. Alors qu’un cessez-le-feu a été convenu dans la première phase d’un accord de paix entre Israël et le Hamas, des scientifiques alertent : le rétablissement de la santé publique, de l’environnement, de l’enseignement supérieur et de la recherche à Gaza ne doit pas reposer sur des solutions « descendantes » mais sur des experts du territoire palestinien, rapporte Nature.
→ Trump mais pas que… Il n’y a pas qu’aux États-Unis que la science est attaquée par le gouvernement. Le média AOC revient sur deux affaires japonaises qui ont mis sur le devant de la scène les tensions entre une grande partie du monde académique et le gouvernement.
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