Bertrand Monthubert : « Les chercheurs autistes peuvent apporter une complémentarité »

— Le 23 juillet 2021
Mathématicien et homme politique, Bertrand Monthubert coordonne le projet Aspie Friendly pour l’inclusion des personnes autistes à l’université. Explications.

Quel est l’objectif premier du programme Aspie Friendly ?

Il s’agit de favoriser l’inclusion des étudiants autistes à l’université et leur insertion professionnelle, qui se fait d’ailleurs parfois dans la recherche. Il faut considérer l’autisme, non pas comme une déficience, mais comme une différence qui peut être une richesse quand on la comprend. Les particularités autistiques peuvent être de grandes forces pour certaines activités, quand l’environnement est adapté.

Comment accompagner celles et ceux qui veulent être chercheurs ?

Beaucoup d’étudiants autistes sont attirés par la recherche par l’intensité de leurs intérêts spécifiques. Que ce soit pour démarrer un doctorat ou plus tard pour chercher un poste, nous essayons de les accompagner dans l’identification d’un laboratoire qui leur convienne, à la fois en terme de sujet mais aussi du cadre (pas trop grand, sans trop de partage d’équipement, etc). Nous travaillons également en profondeur avec les laboratoires pour prendre en compte leurs interrogations et chercher ensemble des réponses. Autrement, ils ne prendraient pas le risque.

Le métier de chercheur est-il adapté aux personnes autistes ?

Les tâches d’un maître de conférences ou d’un chargé de recherche en 2021 ne sont plus uniquement d’avoir des compétences scientifiques et une expertise pointue mais également d’encadrer une équipe, de chercher des financements… En bref, faire du management ce qui est compliqué pour beaucoup de personnes autistes. Mais pourquoi avoir des clones qui savent tous tout faire ? La recherche est souvent un travail collectif, au sein duquel les chercheurs autistes peuvent apporter une complémentarité, notamment sur la production scientifique pure. Il s’agit donc de leur construire une place pour qu’ils puissent se focaliser sur ce qu’ils font le mieux.

Pourquoi vous investissez-vous sur ce sujet de l’autisme à l’université ?

Tout d’abord car j’ai été sensibilisé à l’autisme dans mon environnement familial et que cela me passionne. Ensuite de par mes fonctions : j’ai travaillé sur la stratégie nationale de l’ESR pour le ministère. Un des gros enjeux est d’augmenter le nombre de diplômés du supérieur pour répondre aux besoins de notre société, ce qui passe par l’accueil d’une plus grande diversité d’étudiantes et d’étudiants. Sur la fin du troisième plan autisme, nous – j’étais conseiller spécial du secrétaire d’Etat en charge de l’ESR – avons travaillé pour ajouter un volet d’actions à l’université : le projet Aspie Friendly est en issu.

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