Confinés loin de chez eux 🌍




vendredi 01 mai 2020 /// L’actu des labos
Rien ne sera plus
comme avant

Pour changer, il faut être déconnecté de son environnement. C’est la phase de liminarité, selon la théorie du rite de passage. Et nous sommes en plein dedans.
Certains proposent de ne pas reprendre comme avant. Et vous, qu’avez-vous imaginĂ© pour la vie d’après ?
Bonne lecture,
Lucile de TMN

PS. Pour ceux qui ont l’habitude de battre le pavĂ© le 1er mai, rendez-vous sur les balcons ! Au moins, ça piquera moins les yeux que l’an dernier…


Si vous n’avez que 30 secondes

• Des chercheurs confinés partout dans le monde ;
• Elle a soutenu son HDR en visio et elle vous le raconte ;
• Un outil open et pratique pour créer du vectoriel ;
• Remember notre revue de presse ;
• On a des photos du premier pot de thèse virtuel !



A partir d’ici 5′ de lecture en visio


Confinés loin de chez eux
Être chercheur et confiné, ce n’est pas pareil en France ou à l’autre bout du monde. Pas du tout pareil non plus selon sa discipline. Tour d’horizon.


Confinement marocain
Au Maroc, les écoles sont fermées depuis le 16 mars, alors qu’il n’y avait encore que peu de cas. Aurore Ducellier et son conjoint, enseignants détachés à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) restent depuis confinés. Ces deux docteurs en littérature espagnole sont au Maroc depuis septembre dernier, mais ils continuent à candidater pour un poste en France et à faire de la recherche sur leur temps libre. Pour Aurore, l’accès à ses corpus est compliqué car la plupart sont en France. Elle attend donc la fin de la crise avec impatience pour « pouvoir déballer les derniers cartons d’archives » et finaliser ses articles en cours. Mais ça ne sera pas avant le 20 mai.
« Le boulot, c’est mon seul espace social » 
Laurie Charrieau, postdoc en géoscience à Yokohama 
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Isolement nippon
Au Japon, ni interdiction de sortie ni fermeture stricte. Mais depuis début avril, l’activité du Jamstek (équivalent nippon de l’Ifremer) est réduite. Pour Laurie Charrieau, postdoc en géoscience au Jamstek de Yokohama, travailler dans son studio est impossible. Elle se rend donc dans les quelques cafés qui restent ouverts. Rester seule au Japon pendant le confinement lui faisait peur : « Le boulot, c’est mon seul espace social », avoue Laurie. Mais elle est tout de même positive : « Ici on a moins la sensation d’enfermement, et la situation est moins dramatique qu’en France ». Elle pense que les frontières resteront fermées cet été car le Japon, qui compte moins de 400 morts, voudrait rester isolé au maximum.


Les jeunes chercheurs s’expatrient
Entre le nombre de postes qui se rĂ©duit et les conditions de travail difficile, les jeunes chercheurs passent de plus en plus de temps en dehors de France. Une Ă©tude de 2017 sur la mobilitĂ© des docteurs rĂ©vèle que la moitiĂ© d’entre eux travaillent toujours Ă  l’étranger six ans après l’obtention de leur doctorat. Sur la pĂ©riode 2013-2016, une croissance de 19% du nombre de français qui rĂ©alisent leur thèse Ă  l’international a Ă©tĂ© observĂ©e. En 2016, un doctorant français sur dix Ă©tait expatriĂ©.


Responsabilité allemande
En Allemagne, la gestion de la crise du Covid a été très différente de la France, et le confinement y est moins strict. Ahcène Boubekki, jeune chercheur en machine learning est content d’être à Hambourg plutôt qu’à Paris. Mais il devait partir le 1er avril en Norvège et il a dû démarrer son nouveau projet à distance avec l’université de Tromsø. « L’équipe a pu me donner les accès à leur serveur pour faire des calculs, donc j’arrive à travailler », raconte Ahcène. Le gros enjeu de ces prochains mois sera pour lui la soutenance de sa thèse, peut-être également  à distance, crucial pour signer un contrat de postdoc en juillet. 
« L’angoisse, c’est de ne pas pouvoir rentrer s’il arrive quelque chose  » 
Sabrine Hedouin, postdoc en génétique à Seattle 
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Amélioration aux Etats-Unis
Les conditions de confinement ont été très variées aux Etats-Unis, qui est devenu l’épicentre mondial du Covid-19. Seattle, où vit Sabrine Hedouin, postdoc en génétique à l’institut Fred Hutchinson, a été un des premier foyers de Covid-19. En télétravail depuis début mars, cette expérimentatrice a du mal à travailler à la maison. « L’angoisse, c’est d’être loin, et de ne pas pouvoir rentrer s’il arrive quelque chose à mes proches ». Mais l’amélioration de la situation laisse espérer un déconfinement progressif début mai. La suite au prochain épisode !


Des infos en passant //////// Le fameux rapport de l’Imperial College of London sur le Coid-19 à réviser ? Retraction Watch s’interroge //////// Norecopa, un collectif norvégien, lance un wiki pour l’expérimentation animale //////// Qui s’auto-cite le plus ? Les chimistes, répond une étude réalisée sur presque 400 000 auteurs et publiée dans Scientometrics ////////


On n’Ă©chappe pas aux vecteurs 
Vous ne connaissez pas Inkscape ? Gratuit et open source, ce logiciel de dessin vectoriel est bien pratique pour dessiner des schémas ou embellir vos figures (sans toucher aux données bien sûr !). Une initiation de 3h vous est proposée par l’Urfist Méditerranée jusqu’à fin 2020.


Des infos en passant //////// Vous avez eu des symptômes qui pourraient être ceux du Covid-19 et vous n’habitez pas seul ? Répondez à l’enquête Alcov2 élaborée par des chercheurs français et britaniques pour étudier la transmission du virus au sein des foyers //////// Au moment où les sociétés savantes et d’autres réclament un plan d’urgence pour la recherche, l’appel à stopper toute mesure non urgente dépasse la barre des 17 000 signatures ////////


Trois questions Ă … Emilie Pacary
« Je ne voulais pas
reporter ma soutenance »


Cette chercheuse Inserm Ă  Bordeaux en neurosciences est l’une des toutes premières en France Ă  avoir soutenu son HDR en visio. Elle nous le raconte.


Est-ce plus stressant de soutenir en visio ? C’Ă©tait en rĂ©alitĂ© moins de stress car il n’y avait pas de public [regardez plutĂ´t, NDLR] et pas toute l’organisation autour, comme aller chercher les membres du jury, etc. Lors des soutenances, on est parfois déçu car les questions peuvent ĂŞtre Ă©courtĂ©es Ă  cause de ceux qui ont un avion ou un train Ă  prendre. Dans mon cas, la soutenance a durĂ© trois heures et la discussion a Ă©tĂ© riche. Au niveau pratique, nous avons utilisĂ© Zoom, en groupe privĂ© et sans public. La connexion Ă©tait bonne, il n’y a eu aucun problème. L’outil est très pratique pour le partage d’écran, donc très bien pour faire une prĂ©sentation Ă  distance.

La partie administrative a-t-elle été compliquée ? J’avais rendu le manuscrit la veille du confinement et je ne voulais pas reporter la soutenance pour pouvoir consacrer mon temps à mes expériences à la reprise. J’ai suivi les modalités du 6 avril, proches de celle d’avant le confinement : la soutenance devait avoir lieu dans un établissement de l’ESR avec le président du jury sur place. Je n’ai donc pas eu besoin de dérogation pour soutenir, juste d’une autorisation pour aller au labo. La présidente de jury était dans la même pièce, sur un autre ordinateur et à environ trois mètres de moi pour respecter la distanciation.
Pas de regret de ne pas avoir soutenu en présentiel ? Pas du tout. Je comprends que pour une soutenance de thèse, cela peut être dommage, mais l’HDR est moins symbolique. La célébration aura lieu plus tard, ce n’est que partie remise. De plus, cela valide vraiment le temps de confinement pour moi. Je pourrai ainsi honorer ma promesse d’être rapportrice dans un jury de thèse en septembre et prendre un étudiant en thèse dès que possible.


Votre revue
de presse express



Et pour finir…
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Voici des images d’un des premiers pots de thèse virtuel ! Covid oblige, les canapĂ©s n’ont pas pu ĂŞtre picorĂ© par tous, mais tous ont en revanche trinquĂ© de concert. Plus convivial qu’une cĂ©rĂ©monie avec des avatars