
16.05.2025 • N° 505 • LA RECHERCHE ET SA PRATIQUE
De l’exil à d’asile
Couperet. L’information nous est parvenue d’outre-Atlantique : l’équipe de physiciens menacés de licenciement dont nous vous parlions il y a quelques semaines a bel et bien dû quitter le NIST le 30 avril dernier. Ne leur étaient pourtant reprochés ni prise de position ni sujet de recherche « dérangeant ».
Destin. Actuellement en négociation avec d’autres institutions, ils tentent de rester aux États-Unis. Pourtant, comme en témoignait la chercheuse Camille Parmesan le 5 mai dernier lors du lancement de « Choose France for science », on peut venir du Texas et s’épanouir dans nos contrées.
Non retour. Pendant ce temps, leurs homologues à Gaza ou en Syrie risquent leur vie. La nouvelle, qui vient de tomber, du décès de l’architecte Ahmed Shamia dans un bombardement de l’armée israélienne en est un triste exemple. Il devait rejoindre l’Hexagone avec d’autres gazaouis dans le cadre du programme PAUSE.
Danger imminent. Pensé pour faciliter la venue d’artistes et de scientifiques en danger en France, PAUSE voit pourtant ses budgets réduits alors que les demandes s’accumulent. Non sans émotion, sa directrice Laura Lohéac nous a reçu au Collège de France. Nous vous livrons son interview.

Bonne lecture,
— Lucile de TheMetaNews
Sommaire
→ INTERVIEW Le programme PAUSE est-il en danger ? par Laura Lohéac
→ OUTIL Gérer vos projets comme un·e boss
→ CHIFFRE Des publis peu genrées
→ EXPRESS Votre revue de presse
→ ET POUR FINIR Publi minute
TEMPS DE LECTURE : 5 ou 10 MINUTES |
℗ Contenu réservé à nos abonné·es
INTERVIEW
« À chaque nouveau conflit, les demandes s’accumulent »
Le programme PAUSE d’accueil de chercheurs étrangers en danger est sollicité de toutes parts. Malgré des budgets en forte baisse, sa directrice exécutive Laura Lohéac veut faire front.

Quels bénéfices pour la France d’accueillir des chercheurs en danger ?
↳ Ayant subi des menaces, voire des persécutions, ils sont les premiers défenseurs des libertés, académique et au-delà, et renforcent nos démocraties. Et ils représentent également des acteurs essentiels pour l’innovation. Lors du Forum européen organisé le 7 mai dernier au Collège de France, Philippe Aghion a très bien montré, chiffres à l’appui, à quel point l’accueil des chercheurs étrangers favorise l’innovation. (…)
OUTIL
Gérer vos projets comme un·e boss
Le chef de nous. Pas forcément facile de gérer un projet de recherche, que ce soit en tant que doctorant ou chef d’équipe. Mais des outils peuvent vous y aider. En voici deux, open source of course, testés et approuvés par quelques-uns d’entre vous (merci de nous avoir écrit). Le premier est Focalboard qui propose un logiciel à installer pour un utilisateur unique ainsi qu’un plugin Mattermost (vous l’utilisez peut-être déjà) pour une utilisation collaborative. Le second est Kimai, que vous pouvez héberger (c’est gratuit dans ce cas) ; est également proposé un hébergement payant. Vous ne serez plus jamais pris au dépourvu !
EXPRESS
Pendant ce temps dans les labos
● Résistance. Quatre revues scientifiques, toutes gérées par des associations de médecins aux États-Unis dont le prestigieux Journal of the American Medical Association, ont reçu mi-avril des lettres inquisitrices de la part d’un représentant du ministère de la Justice. Les accusant de partialité, il les sommait de répondre à un interrogatoire et bonne et due forme (voici l’une d’entre elles). Estimant qu’il s’agit là d’une tentative d’intimidation, le New England Journal of Medicine y a répondu en invoquant la liberté d’expression, rapportent la National Public Radio outre-Atlantique et Le Monde ↯. La revue britannique The Lancet communique son soutien et appelle la communauté médicale à résister.
● Thésaurus. Une encyclopédie de la science ouverte vient d’être lancée par le comité du même nom. Elle comporte dix longs articles, également sur Wikipédia – ces derniers évolueront via son système de contribution. Au programme : données, bibliométrie mais aussi infrastructures et modèles économiques de la science ouverte. On retiendra également l’article sur la transparence et la reproductibilité des résultats.
● Point concours. La période des auditions pour les postes de maître de conférences bat son plein. Vous en faites partie ? Relisez notre papier sur le sujet. Côté organismes de recherche, les concours sont plus avancés. On vous rappelle que les résultats de ceux du CNRS sont publiés par le SNCS. Bravo aux admissibles !
● Mais aussi… ● Doctorant·es, êtes-vous sur la même longueur d’onde que votre encadrant ? Répondez à ce questionnaire diffusé par le Laboratoire interdisciplinaire sur le doctorat (LID) ● Vous avez œuvré pour l’ouverture des données de la recherche ? Candidatez jusqu’au 23 juin aux Prix science ouverte des données de la recherche 2025, une récompense de 5000 euros à la clé ●
CHIFFRE
1/10
En France, environ une publication en sciences sociales sur dix mobilise une approche de genre, montre une analyse sur plus de 120 revues déposée sur SocArXiv, en phase d’être publiée dans les Actes de la recherche en sciences sociales. Face aux fantasmes sur l’importance donnée au genre en recherche, les auteurs souhaitaient apporter quelques données factuelles. Le volume de travaux sur le genre n’a que légèrement progressé : 12,2% entre 2020 et 2022 contre un peu moins de 9% dix ans plus tôt.
EXPRESS
Votre revue de presse
→ Délivrés. Arrêtés aux États-Unis mi-mars pour leur soutien à la cause palestinienne, deux chercheurs ont finalement été libérés : la doctorante d’origine turque Rumeysa Ozturk, rapporte France 24, ainsi que le chercheur d’origine indienne Badar Khan Suri, rapporte Ouest France. Deux nouvelles saluées comme des victoires pour la liberté d’expression.
→ Passions. Faut-il arrêter de financer les sciences de l’homme, comme le suggérait récemment un chimiste ↯ dans les colonnes des Échos ? Le Monde publie en réponse une tribune de l’anthropologue Bernard Formoso ↯ rappelant les irremplaçables outils de compréhension qu’elles représentent.
→ Jeté d’éponge. La persévérance a ses limites. Membre du comité de direction de la National Science Foundation, la sociologue Alondra Nelson claque la porte et en explique les raisons dans les colonnes du Time. Le rôle du NSF est en train d’être réduit à peau de chagrin par l’administration Trump au financement de travaux dans quelques domaines porteurs économiquement, explique Science.
→ Sur le front. Les scientifiques doivent-ils s’engager politiquement ? C’était le thème d’une émission diffusée sur Le Figaro TV. Pour y répondre deux chercheurs du CNRS : le climatologue Christophe Cassou ainsi que le président de son conseil scientifique Olivier Coutard. Sur ce sujet de l’engagement, vous pouvez également relire notre analyse.
→ Deux poids. Accueillir des scientifiques états-uniens alors que les jeunes chercheurs français galèrent à trouver un poste ? Le Mouv’ est allé interroger certains d’entre eux, notamment en sciences humaines et sociales, qui se disent choqués. La différence de traitement avec les chercheurs palestiniens est indécente, juge quant à elle une chercheuse – relire également notre interview de la directrice du programme PAUSE.
↯ : liens menant à des articles protégés par un paywall
PUBLI MINUTE
Et pour finir…
Quand un chercheur soumet un faux papier sur les pets… accepté en 45 minutes.