Aux lendemains de la Journée d’éthique de l’Inserm, le président de son comité d’éthique Hervé Chneiweiss revient pour TMN sur le rôle de l’éthique dans la recherche, au moment où certains font rimer ambition et précipitation. Est-ce qu’en encadrant la recherche, l’éthique ne la ralentit pas dans certains cas ? HC.: L’éthique est un outil, une aide, parfois même une béquille ou même un tremplin mais pas du tout un frein ; elle vise à améliorer la qualité des recherches. Reprenons l’affaire des enfants chinois prétendument protégés contre le HIV par utilisation de Crispr [Après le Chinois He Jiankui, un chercheur russe a annoncé vouloir faire de même, NDLR]. Pourquoi avoir condamné ces travaux ? Parce qu’ils n’ont aucun sens : on ne sait pas aujourd’hui éditer le génome d’un embryon humain. Les jumelles nées de cette expérimentation ont pour la première un génome “mosaïque”, donc non protecteur, et pour l’autre des modifications génétiques dont on ne connaît pas la portée. Seul le résultat compte dans ce cas ? HC. : Je le répète : prévenir de cette manière une maladie qu’on sait traiter d’une autre manière n’a pas de sens : une FIV avec un lavage du sperme ou une Prep [prophylaxie préexposition grâce à des médicaments, NDLR] permet d’éviter la contamination. Notre condamnation de cette expérimentation ne vise à pas à freiner la recherche, bien au contraire, mais à l’encourager. Nous n’avons que quatre équipes en France travaillent sur l’embryon, il en faut beaucoup plus ! Nous ne sommes pas là pour dire ce qui est vrai ou faux mais pour réfléchir aux questions qui se posent et créer des boîtes à outils. L’éthique ne concerne-t-elle que les chercheurs ? HC. : Il faut différencier ce qui relève de la science et de la société. Je prends un exemple : l’ouverture de la Procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes ne se joue pas dans les labos Inserm, c’est une question sociétale, qui relève du Comité consultatif national d’éthique (CCNE). En revanche, des sujets émergents comme la recherche sur l’embryon ou les nouveaux modèles d’organoïdes ne sont pas encore dans le champ public mais nous devons y réfléchir dès maintenant. |
Hélène Gispert : « L’absence des femmes aux Nobel n’est que la partie émergée de l’iceberg »
Les femmes sont encore une fois les grandes perdantes de cette série de Nobel 2024. Faut-il s'en indigner ? En effet, si l’on regarde les cinq dernières années, sur les trois prix de médecine, physique et chimie, 29 hommes et seulement six femmes ont été récompensés....