Souriez, vous êtes pistés

06.06.2025 • N° 510 • LA RECHERCHE ET SA PRATIQUE


Un nouveau conférencier invité

Frontières fermées. Cet été la période des conférences battra son plein, mais dans une ambiance particulière. Initialement prévus aux États-Unis, de nombreux colloques ont été réorganisés, voire annulés. Les collègues outre-Atlantique restreignent leurs voyages, les autres hésitent à mettre un pied aux US.

Chat tout fait. Un autre phénomène modifie la donne : l’IA générative. Combien d’entre vous y ont fait appel pour soumettre leur abstract ? Et combien vont préparer leurs slides, voire écrire leur speech grâce à elle ? L’IA pourrait même, imaginons, générer les réponses aux questions du public en direct…

Usage de faux. Bref, irez-vous toujours en conférence quand tout sera fait par des IA, demandait l’un des organisateurs des JRES à Rennes en décembre dernier, face aux participants lui avouant leur (déjà) large utilisation de l’outil.

Derrière les paywalls. À l’autre bout de la chaîne de l’IA : les données. Notamment celles que vous laissez sur les sites des éditeurs scientifiques qui, pour certains, les monétisent. En partenariat avec EPRIST, l’association des responsables de l’Information Scientifique et Technique, on analyse le phénomène.

Bonne lecture, 
— Lucile de TheMetaNews

Sommaire

→  ANALYSE  Quand les éditeurs vous suivent à la trace
→  OUTIL  Trouvez où déposer vos données
→  EXPRESS  Un think tank sur le genre et des prix pour les 3R
→  CHIFFRE  Des essais cliniques trop peu publiés
→  EXPRESS  Votre revue de presse
→  ET POUR FINIR Tellement vrAIs

TEMPS DE LECTURE : 5 ou 10 MINUTES

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ANALYSE

Quand les éditeurs vous suivent à la trace

Quand il s’agit de récolter vos données personnelles, les pratiques des éditeurs varient beaucoup. Les bibliothécaires veillent au grain.

   ↳ « Si c’est gratuit, c’est vous le produit ! » Le phénomène est aujourd’hui bien connu : la plupart des outils numériques que nous utilisons quotidiennement – navigateur web, moteur de recherche, boîte mail, réseaux sociaux… – récoltent nos données pour les vendre et/ou proposer de la publicité ciblée. Que les éditeurs scientifiques, dont l’accès est payé par les institutions ou via les frais de publication, puissent faire de même, serait-il possible ? (…)

OUTIL

Trouvez où déposer vos données

Dépôt de confiance. Archéologie, chimie ou SHS… Où déposer vos données ? Suite à la note produite par le Comité pour la science ouverte sur le sujet, data.gouv liste les liens vers les entrepôts thématiques de confiance.

EXPRESS

Pendant ce temps dans les labos

● Rage against the machisme. Les inégalités de genre persistent dans la recherche : moins de femmes en moyenne, des salaires plus bas… Un groupe d’universitaires lance un think tank sobrement nommé RAGE (pour Réseau académique pour l’égalité de genre) accompagné d’une pétition que vous pouvez signer (si le cœur vous en dit). Las des explications psychologisantes et essentialistes, ils et elles réclament notamment une enquête sur la répartition genrée des responsabilités et des taux de promotions des femmes.

● Replay. Les interventions du colloque sur les enjeux d’intégrité scientifique face à l’essor de l’IA générative organisé par l’Office français de l’intégrité scientifique (Ofis) sont en ligne. On vous conseille notamment le focus sur la publication scientifique avec le chercheur québécois Vincent Larivière.

● Rrrrr. Vous travaillez avec des animaux et avez à cœur de faire avancer le principe des 3R (Remplacement, Réduction, Raffinement) ? Candidatez aux prix du groupement d’intérêt scientifique FC3R d’ici le 6 octobre sur l’une des deux mentions : “culture du soin” ou “recherche”.

  Mais aussi…  Qu’est-ce qui fait un bon papier en ingénierie ? Des critères bien particuliers, clame la revue Communications Engineering dans un éditoFaut-il tenter de répliquer les études en biomédical comme va peut-être l’inciter la nouvelle politique des NIH ? Mike Rossner est sceptique et explique pourquoi dans les colonnes de Retraction Watch Ce dernier vient d’ailleurs de lancer The Medical Evidence Project pour enquêter et informer rapidement sur les publications problématiques dans le domaine de la santé

CHIFFRE

44%

Moins de la moitié (44%) des essais cliniques débouchent sur la publication d’un article ou le partage des données, révèle les données du Baromètre de la science ouverte reprises dans un rapport interministériel publié le 12 mai 2025. « Une problématique d’ordre scientifique, de santé publique, de financement gâché et d’intégrité scientifique », conclut le groupe de travail chargé d’identifier des leviers d’amélioration. Parmi leurs recommandations : la publication d’un guide, la formation des chercheurs mais aussi la prise en compte de ce paramètre dans l’évaluation et l’attribution des financements.

EXPRESS

Votre revue de presse

→ Entailles. Des collaborations en pause, des collègues qui pleurent en visio, des doctorants sans manip… les conséquences des coupures budgétaires aux États-Unis se font largement sentir chez leurs voisins du Canada ↯, rapporte Nature. Les économies faites dans les essais cliniques risquent d’avoir des impacts dramatiques en santé partout dans le monde, rappelle le même média.

→ Protection totale. Face aux purges outre-Atlantique dans les bases de données, la politique européenne de science ouverte est un excellent rempart ↯, affirme dans une tribune au Monde la chercheuse en droit Agnès Robin.

→ Cerveaux pucés. Implants cérébraux ou dispositifs moins invasifs mais tout aussi controversés… Sous l’égide de l’Unesco des experts se sont réunis à Paris le mois dernier pour ébaucher neuf principes d’éthique des neurotechnologies, notamment pour protéger les futurs usagers (à lire ici). L’adoption de ces recommandations sera votée en novembre ↯, informe Nature.

→ Aspire-tout. À l’heure de la course aux IA génératives où les données valent de l’or – lire notre analyse du jour, les bases ouvertes de publications, d’images scientifiques et même les sites des éditeurs scientifiques se retrouvent submergés par les visites de robots venus “scraper” un maximum de données ↯, rapporte Nature.

→ Nouveau départ. Postdoc, imaginez-vous qu’on vous vire du jour au lendemain faute de financement. C’est ce qui est arrivé à Gertrude Nonterah qui témoigne dans Science comment elle a rebondi et s’est reconvertie dans l’écriture… toujours sur des sujets scientifiques.

↯ : liens menant à des articles protégés par un paywall

TELLEMENT VRAIS

Et pour finir…

Est-ce que vous aussi, bientôt, vous vous ferez passer pour des IA pour être lu ?