Je vais vous parler un peu de moi.
En tant que postdoc (j’étais en physique quantique), je me satisfaisais de publier mes travaux en preprint sur arxiv (un site d’archives ouvertes) et de les soumettre en même temps à un journal à l’accès payant (PRL les bons jours). Ah oui, j’ai aussi mis ma thèse sur HAL. Mais l’Open Access, c’est beaucoup plus !
Bonne lecture,
Lucile de TheMetaNews
PS. Pour les novices ou vos amis non-chercheur (eh oui, je suis sûre que certains d’entre vous en ont !) : quelques principes de base du libre accès en vidéo par Datagueule. Pas mal fait, même si ça date déjà d’il y a 3 ans. |
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Pourquoi publier en libre accès ?
Je ne vais pas vous refaire le laïus sur le partage des connaissances à l’ensemble de la société, du caractère service public de la recherche académique, etc. Un autre argument, mis en avant lors de l’international open access week, qui vient de se finir, c’est l’équité. En effet, avec un système de publications payantes (que ce soit pour le lecteur ou bien pour les auteurs), les chercheurs des pays intermédiaires ou pauvres sont très largement défavorisés.
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Un chiffre
41%
des publications sont
en accès libre en France en 2018
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C’est ce qu’indique le baromètre du ministère (avec des données en libre accès !). Ce chiffre comprend à la fois l’accès ouvert chez l’éditeur et les archives ouvertes, et il stagne depuis 2013. Si on compare les disciplines, en bas du classement on trouve les sciences sociales avec 30%, et en tête, les mathématiques avec plus de 60% de publications en accès libre. Pas de quoi pavoiser non plus, hein ? |
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« Ne plus se rendre complice du système qu’on dénonce »
En parallèle de ses travaux sur l’autisme à l’Institut Pasteur, Guillaume Dumas est très impliqué dans les questions de science ouverte. Le co-fondateur de HackYourPhD casse les clichés sur l’open access.
Que répondez-vous aux chercheurs qui disent : « L’open access, c’est bien beau, mais je n’ai pas 2000€ à dépenser pour publier des articles » ?
GD Premièrement, déposez à minima vos preprints sur des archives ouvertes comme HAL pour les rendre accessible. Pour les petits budgets, il est possible de négocier avec certains journaux les APC [article processing charge, NDLR]. Ils sont notamment diminués voir annulés pour les pays en voie de développement. A long terme, on pourrait transformer le système actuel où les institutions paient très cher des abonnements aux éditeurs et utiliser cet argent pour payer les publications [et mettre en open access, NDLR]. En attendant, chaque chercheur peut budgétiser ses publications dans les demandes de financements, en rajoutant les APC. Les financeurs veulent de la visibilité donc cela ne leur posera aucun problème.
Certains chercheurs publient dans des revues à l’accès payant, et mettent par ailleurs une version sur un site d’archives ouvertes. Qu’en pensez-vous ?
GD Ce n’est qu’une solution de transition, qui répond à la pression sur les CV des chercheurs. Il faut que chacun fasse un effort pour modifier ses habitudes et ne plus se rendre complice du système que la communauté dénonce. En sociologie des sciences, on parle de l’importance du crédit des travaux de recherche, aujourd’hui détenu par les éditeurs. Il faut absolument changer ça. Certains font confiance aux revues payantes comme garantes de la qualité et de la rigueur scientifique, mais ce n’est pas forcément vrai. Au contraire, il y a une corrélation entre le taux rétractation et le facteur d’impact des journaux.
Peut-on avoir un bon CV tout en publiant en libre accès ?
GD Ce n’est pas évident et il y a une très forte inertie. Certains journaux en libre accès ont déjà un impact factor haut, comme PLoS Biology ou eLife, mais pas tous. En thèse, j’avais insisté pour publier un de mes résultats dans une revue en libre accès, et c’est aujourd’hui ma publication la plus citée ! Et lorsqu’on a une posture clairement affichée, les gens comprennent. Je remarque quand même que les mentalités change parmi les jeunes chercheurs, et c’est encourageant.
Propos recueillis par Lucile Veissier
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Le système APC et au delà
Gratuit pour les lecteurs, oui, mais payant pour les auteurs. C’est le principe du système des article processing charge (APC), qui prend de plus en plus d’ampleur. Certains éditeurs sont des organisations à but non-lucratif, d’autres sont à but uniquement lucratif…
D’autres modèles sont discutés aujourd’hui chez les éditeurs, comme en témoigne une employée de PLOS. Parmi de nombreuses alternatives, une organisation collaborative entre les éditeurs et les institutions est évoquée. D’ailleurs, Research England vient de mettre 2 millions de livres sur la table pour aider les petites structures d’éditions se lançant dans le libre accès.
Et le peer review 100% gratuit, c’est possible ? Presque ! Un exemple : le journal Atmospheric Chemistry and Physics, géré par la communauté scientifique, propose la publication d’articles pour moins de 100 euros par page, avec en plus un peer reviewing transparent.
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Les outils de l’ouverture
Pour archiver Des bibliothécaires rennais vous ont préparé une présentation assez exhaustive sur pourquoi et comment déposer sur archives ouvertes vos publications. Et si vous ne vous sentez pas à l’aise avec HAL, le CNRS organise des webinars pour tout savoir sur cette plateforme d’archive institutionnelle.
Pour trouver son journal en libre accès La base de données Sherpa-Romeo recense l’ensemble des journaux et leurs politiques de publication avec un code couleur. Il existe aussi Directory of Open Access Journals (DOAJ) où on peut rechercher par mot-clé les articles. Lorsqu’on parle d’APC, attention aux journaux prédateurs ! La liste circule sur internet, soyez prudent.
Pour consulter Unpaywall est une extension de navigateur qui permet d’accéder en un clic à une version en libre accès d’articles publiés dans des revues payantes. Une alternative (légale) à Sci-Hub qui peut vous faire gagner du temps. |
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les 18-19 novembre 2019, à Paris.
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Notre revue de presse express
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ET POUR FINIR
La thèse est un long fleuve pas toujours tranquille. Alors pour en témoigner, Caitlin Kirby, une étudiante américaine a décidé de faire un pas de côté en se confectionnant une robe faite du best-of de toutes les lettres de refus qu’elle a dû essuyer en quatre ans et demi. Le jury a adoré et, oui, elle a eu son doctorat. (Via Washington post)
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