Huit ans après votre doctorat, êtes-vous toujours une jeune chercheuse ?
Je suis une “vieille jeune”. C’est le deuxième passage compliqué – le premier étant celui d’étudiant à permanent —, parce que j’entre dans la cour des seniors. Les appels à projet ANR jeunes chercheurs sont limités dans le temps après la thèse, le défi est de maintenir une forte activité de recherche tout en rebondissant sur de nouvelles thématiques… et en enseignant en parallèle.
Vous sentez-vous légitime en tant que porteuse de projet ?
Je me demande parfois si je suis la mieux placée [elle a même twitté pour le dire, NDLR]. L’an dernier, ma candidature ANR a été rejetée, comme beaucoup d’autres, et les évaluateurs n’ont pas remis en cause le projet en lui-même mais ma capacité à le mener au vu de mon CV. Pourtant, sans moi, il n’aurait pas vu le jour ! Il faut se battre contre ses propres doutes et on réalise au bout d’un moment que, même si l’on est la seule femme, jeune et enseignant-chercheur de surcroît, on est aussi légitime.
Est-ce donc plus compliqué quand on est une femme ?
Il est difficile de dire à quel point le fait d’être une femme a joué. Certains de mes collègues masculins reçoivent aussi ce genre de commentaires. Mais il est clair que des biais existent, comme le montre des études sur l’évaluation de CV académiques en fonction du genre.
Comment évoluez-vous dans un monde principalement masculin ?
Au quotidien, je me sens parfaitement sur un pied d’égalité avec mon collaborateur principal. Cependant, à l’extérieur du labo, il est souvent vu comme le “meneur” de notre projet : c’est souvent lui qui est invité à présenter nos résultats ou qui est contacté à propos de notre publication… alors que j’étais la mieux placée pour répondre à des questions !