14 janvier 2022 | La recherche et ses pratiques
Doctorants,
stars de la rentrée
Retour au labo. C’est avec joie que je vous envoie le premier numĂ©ro d’InsideLab de 2022. J’espère qu’il vous trouvera en pleine forme parce que cette nouvelle annĂ©e dĂ©marre fort .
Rentrée chargée. Le doctorat joue la star avec deux grandes actus, a priori contradictoires : d’un côté, une grande enquête insiste sur la satisfaction des doctorants, de l’autre un essai – qui a la faveur des médias – met l’accent sur les difficultés des jeunes chercheurs.
Double face. Qu’en retenir alors ? Dans ce numéro, on vous donne l’essentiel, accompagné de notre analyse : ces deux documents dévoilent deux aspects du doctorat qui co-existent malgré leurs contradictions.
Rien n’est innocent. On vous l’avait dĂ©jĂ annoncĂ©, des changements vont s’opĂ©rer. Un projet d’arrĂŞtĂ© – qui a fuitĂ© – fait actuellement l’objet d’une concertation. Nous vous en reparlerons dans deux semaines.
Bonne lecture,
Lucile de TMN
 PS  Un petit pas pour le CNRS, un grand pas pour TheMetaNews… Le CNRS rejoint les dix premiers Ă©tablissements abonnĂ©s Ă TMN pour 2022 et ouvre le mĂ©dia Ă tous ses chercheurs. Faites passer le mot Ă vos collègues ! |
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Si vous n’avez que 30 secondes
- L’Ă©tat des lieux du doctorat… et des doctorants
- Adèle Combes dénonce la souffrance des doctorants
- Des infos en passant
- Votre revue de presse express
- Et pour finir avec des notifications Ă gogo
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Cinq minutes de lecture passionnante
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Les deux visages du doctorat
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Deux enquĂŞtes dressent un portrait contrastĂ© de l’Ă©tat du doctorat en France. |
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Avez-vous eu la chance de tomber sur la bonne Ă©quipe ?
Première importance. L’enquĂŞte montre tout d’abord — au cas oĂą quelqu’un en doutait — le poids du doctorat dans la recherche française. Les doctorants sont de fait associĂ©s Ă plus de la moitiĂ©Â des productions scientifiques, tĂ©moignent très majoritairement leurs encadrants. VoilĂ qui rĂ©sume tout le paradoxe de leur positionnement dans les laboratoires.
Petites mains pour certains… Selon une autre enquĂŞte dĂ©voilĂ©e rĂ©cemment par Vies de thèse (voir l’interview d’Adèle Combes â–Ľ), certains doctorants se vivent comme de simples exĂ©cutants (19% des 1900 rĂ©pondants). Le RNCD insiste lui sur le fort taux de satisfaction : pour plus de deux tiers des doctorants interrogĂ©s, l’expĂ©rience correspond Ă leurs attentes et Ă leur vision.
… satisfaction pour d’autres. Les deux enquêtes se complètent finalement bien au sujet de la relation entre les doctorants et leur directeur·rice de thèse. Quatre doctorants sur cinq se déclarent satisfaits de leur encadrement selon le RNCD, un sur cinq avoue avoir subi un harcèlement moral – ou un vol de résultats en même proportion –, d’après Vies de thèse.
Deux, c’est pas toujours mieux. Le co-encadrement est Ă©tonnamment frĂ©quent puisqu’il concerne deux tiers des doctorants en troisième annĂ©e selon le RNCD. Il est d’ailleurs Ă double tranchant : deux encadrants valent mieux qu’un, certes, sauf s’ils ne s’entendent pas ou manquent de coordination. Autre motif d’insatisfaction, sans surprise : le financement des thèses, toujours problĂ©matique.
A la conquĂŞte du grand public. Sylvie Pommier, prĂ©sidente du RNCD et Adèle Combes – aka Vies de thèse – s’accordent sur le constat que les situations problĂ©matiques sont minoritaires… mais pas sur les prioritĂ©s qui en dĂ©coulent. Si, pour Adèle Combes, l’urgence est de mettre fin Ă ces situations, Sylvie Pommier prĂ©fère donner une image du doctorat plus positive auprès du grand public, notamment pour amĂ©liorer l’insertion professionnelle des doctorants.
  La recherche avant tout L’enquĂŞte du RNCD rĂ©vèle que doctorants et encadrants se focalisent durant la thèse sur les rĂ©sultats scientifiques et l’apport de connaissance : deux tiers des doctorants veulent faire carrière dans la recherche publique. Au grand dam du RNCD pour qui l’acquisition de compĂ©tences utiles pour travailler hors de l’acadĂ©mie doit devenir l’un des objectifs principaux du doctorat.
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Donnes-moi ta discipline, je te dirai combien de doctorants tu as
L’enquête du RNCD révèle d’importantes différences dans les pratiques d’encadrement. S’il est très rare en sciences de la vie qu’un directeur de thèse encadre plus de cinq doctorants, la situation est fréquente en sciences humaines. Les doctorants se plaignent alors du manque de disponibilité de leur encadrant, avec des rencontres à peine mensuelle en SHS – contre plusieurs fois par semaine en sciences “dures”. Cette fréquence des rencontres joue très clairement sur le taux de satisfaction des doctorants.
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Trois questions (ou plus) à … Adèle Combes
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« La recherche, c’est avant tout des ĂŞtres humains » |
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Harcèlement, appropriation de rĂ©sultats, discrimination… des situations que dĂ©nonce Adèle Combes Ă travers une enquĂŞte et des tĂ©moignages. |
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Votre livre est un cri d’alerte. A qui est-il destinĂ© ?
Ă€ beaucoup de personnes, du doctorant au politique. Mais tout d’abord Ă ceux qui ont souffert et n’ont pas obtenu reconnaissance de leur prĂ©judice. J’ai l’espoir qu’en parler publiquement les aidera Ă guĂ©rir et Ă aller de l’avant. Je le destine Ă©galement aux personnes en doctorat confrontĂ©s Ă des abus pour leur montrer qu’elles ne sont pas seules. Le livre s’adresse enfin aux Ă©tudiants en master qui s’apprĂŞtent Ă faire une thèse avec le message suivant : ne fuyez pas le monde de la recherche. La thèse peut ĂŞtre une expĂ©rience magnifique mais il faut avoir conscience de certaines choses : un rĂ©pondant sur cinq Ă mon enquĂŞte a vĂ©cu du harcèlement moral, par exemple. En mettant des mots, en montrant comment une relation professionnelle peut dĂ©gĂ©nĂ©rer, j’espère les aider Ă identifier des situations anormales qu’ils n’ont pas Ă accepter.
Quel message souhaitez-vous faire passer aux chercheurs permanents ?
Ă€ travers mon livre, je m’adresse aussi aux nombreux titulaires bienveillants qui peuvent ĂŞtre tĂ©moins d’abus mais n’osent pas forcĂ©ment agir : ce n’est pas toujours facile de s’opposer Ă un collègue. On a besoin d’eux dans ce mouvement : on ne peut plus se permettre un soutien confidentiel, je leur demande de prendre partie sans ambiguĂŻtĂ©s. Mon livre s’adresse Ă©galement aux dĂ©cisionnaires pour leur montrer que la recherche, ce n’est pas que des chiffres, ce n’est pas que des brevets et le classement de Shanghai. La recherche, c’est avant tout des personnes qui doivent ĂŞtre respectĂ©es et travailler dans de bonnes conditions, aussi bien humaines comme financières. Enfin, j’ai l’espoir que certaines personnes qui ont pu contribuer Ă ce système toxique se remettent en question. Des lecteurs commencent d’ailleurs Ă envoyer mon livre Ă leur ancien directeur ou leur ancienne directrice dans l’espoir d’une prise de conscience.
Quelles sont les causes des problèmes que vous abordez ?
C’est une question dĂ©licate. Il y en a plusieurs : par exemple, la course Ă l’excellence et pour les financements est une source de stress, qui crĂ©e de la compĂ©tition nĂ©gative et peut impacter les relations humaines. Il serait très intĂ©ressant de l’Ă©tudier en profondeur. En revanche, ça n’excuse en rien le harcèlement ou les discriminations. Un grand nombre de chercheurs sous pression ne deviennent pas pour autant des harceleurs. Si l’on prenait plus soin des jeunes chercheurs et titulaires, si l’on finançait mieux la recherche, si l’on sensibilisait activement aux violences sexuelles et sexistes mais aussi aux violences psychologiques, si le droit du travail Ă©tait rĂ©ellement appliquĂ© dans toutes les Ă©quipes, si l’on dĂ©construisait le mythe qui veut qu’on doive souffrir pour faire une bonne thèse, beaucoup de situations seraient dĂ©samorcĂ©es. Et la recherche en bĂ©nĂ©ficierait.
Vous proposez aussi des solutions concrètes, notamment au sujet du comité de thèse.
Ces solutions se sont construites au fil de mes lectures, de mon expĂ©rience et au contact des tĂ©moins de ce livre. Au sujet du comitĂ© de suivi de thèse, beaucoup de doctorants en conflit avec leur direction s’autocensurent de peur que leur situation n’empire. Comment savoir si l’on peut faire confiance Ă des personnes choisies par son propre directeur de thèse ? Je prĂ©conise de sĂ©parer le suivi scientifique et d’effectuer un suivi des relations humaines et du bien-ĂŞtre psychologique par une personne indĂ©pendante, formĂ©e à ça [ce n’est pas du tout ce que prĂ©voit le projet d’arrĂŞtĂ©, nous y reviendrons, NDLR]. MĂŞme en dehors de toute situation conflictuelle et de toute prĂ©caritĂ© financière, la nature exigeante et parfois solitaire du doctorat peut entraĂ®ner du stress et du dĂ©couragement. On doit pouvoir parler sans craintes, ni pour sa carrière ni pour l’image que l’on renvoie Ă ses pairs.
Photo : Clément Bonnier © Flammarion
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 Des infos en passant  Les JournĂ©es europĂ©ennes de la science ouverte auront lieu les 4 et 5 fĂ©vrier Ă l’AcadĂ©mie des sciences //////// L’universitĂ© Toulouse III bombe le torse : le chercheur Guillaume Cabanac (qu’on avait interviewĂ© et qui nous a Ă©crit) fait partie des dix personnalitĂ©s qui ont marquĂ© la science en 2021 selon Nature. Bravo Ă lui //////// Lancement d’un Institute for Replication par Abel Brodeur, professeur d’économie Ă Ottawa, pour promouvoir les travaux testant la reproductibilitĂ©, Ă travers le soutien Ă leur publication et leur indexation //////// Autre lancement, celui d’un mĂ©dia d’actualitĂ© scientifique grand public par email tout comme TheMetaNews : brief.science //////// |
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//////// Quand les preprints deviennent un outil pĂ©dagogique, un article paru dans PlosOne //////// Appel Ă projet Sciences participatives en situation d’interdisciplinaritĂ© par le CNRS, ouvert jusqu’au 2 fĂ©vrier //////// Science ouverte encore, les jeunes chercheurs europĂ©ens se sentent concernĂ©s mais n’en sont pas tous au mĂŞme point dans l’évolution des pratiques de publication, rĂ©vèle une Ă©tude mise en ligne sur F1000 Research //////// La plateforme arXiv a maintenant plus de deux millions de preprints Ă son compteur //////// Un entretien avec le co-fondateur de Peer Community In, Denis Bourguet, sur la chaĂ®ne Youtube Papotages Scientifiques //////// Les revues prĂ©datrices sont de fausses revues, soit, mais n’ont pas forcĂ©ment de proie (i.e. les chercheurs savent très bien Ă qui ils ont affaire et profitent de ce service), pour l’auteur du blog Scientist Sees Squirrel //////// |
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