Un arrêté en cours d’élaboration propose de nouvelles dispositions censées améliorer la qualité des thèses. Si vous avez raté le début. Le projet d’arrêté sur le doctorat – qui a fuité début janvier sur Academia – peut surprendre car rien dans la loi Recherche de 2020 ne l’annonçait. Mais les débats autour de la suppression de la qualification ont entaché la réputation des docteurs : pourquoi, dans certaines disciplines comme le droit, les deux tiers des candidats à la qualification sont écartés ? Leur thèse est-elle mauvaise ? « En réalité, je pense qu’il faut qu’on reprenne tout depuis le début. Les thèses doivent justifier d’un vrai travail de recherche », nous affirmait Frédérique Vidal il y a tout juste deux ans. Le bon grain. L’objectif de cette réforme est claire : faire du doctorat « un diplôme sans faille », selon une source ministérielle. En d’autres termes, il s’agirait de mettre fin aux thèses de complaisance et d’évincer les doctorants n’ayant pas le niveau – une notion encore à définir –, même s’il est dur de jauger l’importance réelle du phénomène. Evalué·e·s. Cela passerait donc par plus d’évaluation des doctorants, via deux mesures, déjà discutées lors de la journée du doctorat en octobre dernier – nous vous en parlions – et aujourd’hui proposées dans ce brouillon d’arrêté : – un go/no go dès la fin de la 1ère année. Le comité de suivi de thèse devra se réunir et donner son avis pour l’inscription en 2e année de doctorat (c’est le cas aujourd’hui uniquement pour la 3e année) ; – une pré-soutenance à huis-clos. Une commission, à la composition encore floue, examinera le candidat quelques mois avant la vraie soutenance afin de donner un avis pour l’autorisation de soutenance, qui serait toujours délivrée par le directeur de l’établissement. Évaluation. D’après l’enquête (cf. notre numéro) du Réseau national des collèges doctoraux (RNCD), les doctorants semblent plutôt satisfaits de leurs comités de suivi. La satisfaction est d’ailleurs plus grande pour la moitié d’entre eux qui ont eu un droit de regard sur sa composition. La présidente du RNCD Sylvie Pommier est donc confiante :« La réforme de l’arrêté de 2016 devrait permettre de faire évoluer les comités de suivi dans les directions privilégiées par les doctorants. » Plus d’écoute. La Confédération des jeunes chercheurs (CJC) est, elle, moins enthousiaste : ses représentantes Julie Crabot et Pauline Bennet pensent au contraire que « renforcer le rôle de sanction du comité de suivi ne permettrait plus au doctorant de s’exprimer dans un cadre bienveillant, ce qui serait particulièrement dommageable ». Même enseigne. Au sujet de la pré-soutenance, inspirée de modèles étrangers où les thèses sont plus longues, la CJC s’inquiète de la difficulté à tenir les délais en trois ans. De plus, va-t-elle être instaurée de manière systématique malgré la lourdeur qu’elle risque d’entraîner ? Très certainement car le soupçon de “mauvaises thèses” continuera de planer si elle est utilisée uniquement dans certains cas. Arrangement. Enfin, cette pré-soutenance ne serait-elle pas redondante avec le travail des rapporteurs ? « Organiser en préalable à la soutenance un débat approfondi autour du manuscrit de la thèse, avec au minimum les rapporteurs, pourrait apporter un plus sans trop alourdir le dispositif », suggère le RNCD. Notre analyse Ces deux dispositions encore hypothétiques vont forcément alourdir la machine. Régleront-elles le problème des thèses de complaisance ? Peu probable, si c’est toujours le directeur de thèse qui propose les membres des comités et commissions. En cas de conflit, ces mesures affaibliraient encore plus le doctorant face au directeur de thèse. Elles peuvent toutefois être utiles en aidant le directeur de thèse à “faire passer le message” à un doctorant qui n’aurait pas le niveau. |
Calendrier pas trop serré Des concertations sont en cours sur des points techniques. Alors que le RNCD a déjà échangé avec le ministère, l’Andès – qui s’est exprimée – et la CJC seront bientôt reçues. L’ANRT est également de la partie. Suivra ensuite un dialogue avec les syndicats courant mars, selon le ministère. L’objectif est d’avoir une circulaire en juin pour que tout soit opérationnel en septembre. |