08.11.2024 • LA RECHERCHE ET SA PRATIQUE
Trump le monde
Figure. Connaissez-vous Naomi Oreskes ? Cette historienne des sciences s’est notamment rendue célèbre pour avoir dévoilé la méthode des industries du tabac puis du pétrole pour décrédibiliser les résultats scientifiques les dérangeant. Je vous recommande la lecture des Marchands de doute.
Outre-Atlantique. C’est avec un grand plaisir que nous l’avons écoutée durant une heure ce mercredi – Labos 1point5 l’avait invitée à présenter ses travaux, visiblement ébranlée par les résultats de la présidentielle américaine ayant permis à Donald Trump de reprendre les rênes du pays.
Vases communicants. Vous pensiez faire gentiment votre boulot en toute objectivité, les politiques décidant ensuite sur cette base factuelle ? Naomi Oreskes a cassé ce mythe avec des exemples flagrants de physiciens influents et climatosceptiques, qui ont scellé les politiques étasuniennes d’inaction climatique.
Place à l’action. Et même lorsqu’on est conscient des enjeux, arrive-t-on à agir ? La question était en fil rouge du colloque de Labos 1point5, collectif qui vise à mesurer et réduire l’empreinte écologique de la recherche. Nous y étions et vous en rapportons les grandes lignes dans notre analyse de la semaine.
Bonne lecture,
— Lucile de TheMetaNews
Sommaire
→ ANALYSE L’heure du bilan (carbone) pour Labos 1point5
→ OUTIL Des images dans la thèse
→ CHIFFRE Des data sur les data… papers
→ EXPRESS Votre revue de presse
→ ET POUR FINIR Du côté de chez Sam
TEMPS DE LECTURE : 5 ou 10 MINUTES |
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ANALYSE
L’heure du bilan (carbone) pour Labos 1point5
Pour réduire l’impact environnemental de la recherche, certains analysent les données, d’autres réfléchissent à des modèles alternatifs… Labos 1point5 est aujourd’hui à la croisée des chemins.
Crédit photo : Laurent Pagani/Labos 1point5
↳ Un groupement de recherche (ou GDR pour les intimes), vous en avez peut-être un dans votre domaine : regroupant les équipes travaillant autour d’une même thématique, il permet d’animer la communauté, d’organiser des colloques… Parmi les 32 existants au niveau national, l’un est d’un genre particulier : Labos 1point5, dont la raison d’être est de comprendre l’empreinte environnementale de la recherche et la réduire (…)
OUTIL
Des images dans la thèse
No copyright. Saviez-vous qu’un·e doctorant·e pouvait utiliser dans son manuscrit de thèse jusqu’à vingt images protégées sans demander l’autorisation aux auteurs ? Françoise Acquier de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble répond aux interrogations des doctorants sur la publication d’images, prises par eux ou par d’autres, en tenant compte des droits d’auteur et des droits à l’image, sur son blog Éthique et droit en SHS.
EXPRESS
Pendant ce temps dans les labos
● Sur la croisette. Huit doctorants ont été récompensés par les prix science ouverte de la thèse, remis ce mercredi à Lille lors de la journée nationale du doctorat – Noémie y était, vous pourrez lire son analyse mercredi prochain. Bravo à Thibault Clérice, Marcin Trzmielewski, Dayle David, Aurore Turbiau, Sacha Hodencq, Benoît Verhaeghe, Camille Juigné et Léo Delalandre.
● Vitesse ou précipitation. Coup de neuf pour la déclaration d’Helsinki qui édicte les principes éthiques en recherche médicale depuis 1964. La nouvelle version, publiée dans le célèbre Journal of the American Medical Association, rappelle notamment la nécessité de respecter ces principes éthiques même dans les situations d’urgence (vous devez penser comme nous à l’épisode Covid) et introduit les notions d’intégrité scientifique. Un véritable événement pour la Revue médicale.
● Alphabet. Après le h-index (relire notre interview de son créateur), le S (comme sharing) index ? Le National Institutes of Health étasunien organise un grand challenge pour construire ce nouvel indicateur qui récompensera les chercheurs qui font l’effort de partager au mieux leurs données afin qu’elles puissent être réutilisées par d’autres. Un concours qui se déroulera entre 2025 et 2026, avec plusieurs prix pour un montant total d’un million de dollars. Dans les colonnes du Transmitter, le neuroscientifique Loren Frank trouve l’idée bonne, même si elle ne résoudra pas tous les problèmes de reproductibilité.
● Mais aussi… Une journée d’études sur l’encadrement doctoral aura lieu les 21 et 22 novembre à Besançon, organisée par les chercheurs Vincent Lebrou et Luc Sigalo Santos (que nous avions interrogés pour notre analyse sur le sujet), et que vous pourrez suivre en visio ● Springer Nature veut vous vendre plus de produits issus de l’IA et recrute pour cela une ancienne de chez Bayer (oui oui, vous avez bien lu et c’est écrit dans leur communiqué) ●
CHIFFRE
1/3
Moins d’un tiers d’entre vous aurait déjà publié un data paper, si l’on extrapole l’enquête réalisée par Inrae à l’automne dernier et ayant reçu quelques centaines de réponses. Pour rappel, un data paper est une publi qui décrit des jeux de données, leur méthode d’obtention et leurs potentiels pour la recherche. Il peut être publié en amont, en parallèle ou bien après un article de recherche. Parmi les difficultés identifiées : la rédaction et le coût de publication, alors que l’outil d’aide conçu par Data gouv reste inconnu de 72% des répondants.
EXPRESS
Votre revue de presse
→ Sous le choc. Évidemment beaucoup de réactions de chercheurs inquiets suite à l’élection de Donald Trump aux États-Unis. La revue Nature estime dans un édito que la communauté doit rester unie alors que d’autres, interrogés par la partie magazine, se tiennent prêts à affronter le pire.
→ Boule de cristal. Historien ou voyant ? Le chercheur Allan Lichtman d’une université privée américaine annonçait avoir prédit le résultat de l’élection grâce à une analyse fine de la campagne. Ouest France rapportait sa méthode infaillible… qui a failli (malheureusement) !
→ En haut de l’affiche. Comment mettre à l’honneur les jeunes de son équipe ? Le chimiste Yutan Getzler raconte dans les colonnes de Science careers qu’il immortalise les découvertes de nouvelles molécules réalisées par ses doctorants en les prenant en photo, les plaçant ensuite sur un hall of frame de l’équipe.
→ CV au top. Mohamed Koubaa, chercheur et professeur à l’École supérieure de chimie organique et minérale (Escom), a vu son nom apparaître parmi la fameuse liste des Highly cited researchers. Le Parisien est allé l’interroger ↯, convaincu qu’il va créer des vocations.
→ People. Une chercheuse à l’œil de lynx, un président d’université qui publie un peu trop vite et un journaliste prêt à faire exploser le scandale… bienvenu dans l’affaire Marc Tessier-Lavigne, révélée via Elisabeth Bik dans les colonnes du Stanford Daily, raconté à la sauce Vanity Fair.
→ до свида́ния. Fin de la participation des équipes russes au sein de la grande collaboration internationale en physique des particules, nous avons nommé le Cern. Inquiétudes parmi les chercheurs qui craignent des retards, malgré les paroles rassurantes de l’administration, rapporte Le Temps.
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