Philippe Pajot : « La voix des chercheurs serait fragilisée »

— Le 17 juin 2020
Philippe Pajot, red’chef de La Recherche, décrypte pour TMN les menaces qui pèsent sur le magazine.

La recherche sans La Recherche ? Quels risques court La Recherche aujourd’hui ? 

Si, comme il est prévu, La Recherche est fusionné avec Sciences&Avenir, c’est la porte ouverte à notre disparition pure et simple, même si je fais des plans sur la comète. En l’état, le projet fait disparaître toute notre spécificité : ce lien entre chercheurs et grand public. On ne peut pas faire moitié moitié, il resterait certes quelques pages labellisées La Recherche dans ce nouveau titre, ainsi qu’un mook trimestriel [mais qu’est-ce qu’un mook, NDLR] mais la voix des chercheurs serait fragilisée et les lecteurs ne s’y retrouveraient pas.

Les chercheurs vous soutiennent-ils ?

On en est déjà à près de 3 000 réponses à notre pétition [on a signé, bien sûr, NDLR]:  des prix Nobels, des médailles Fields, les PDG du CNRS, de l’Ifremer, des médailles d’or, des académiciens aussi bien que des chercheurs de tous horizons. Il y a trois types de réactions : les premières déplorent les menaces sur un magazine pluridisciplinaire de haute qualité, les autres regrettent la rupture du lien entre sciences et société. Et puis il y a notre rôle de rempart contre les fake news, comme le dit Hervé Chneiweiss, il serait « dramatique de quitter le terrain au moment où le jeu commence vraiment ».

Êtes-vous optimiste pour la suite ?


Oui et non, je ne peux pas me prononcer encore. Bien sûr, on peut se poser la question de revoir le modèle de La Recherche, pour être plus présents sur le web et sur l’info scientifique en général, mais cette place unique on veut la préserver. Je ne suis pas sûr que Claude Perdriel [propriétaire du titre, NDLR], qui a, à son crédit, d’avoir financé la presse pendant des années, soit sensible aux arguments des chercheurs. Une porte de sortie serait de vendre le titre à un groupe de presse ou à des hommes d’affaires qui ont un intérêt dans les sciences. Nous verrons.

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