Christian Gianese : « Ça a été un crève-cœur d’arrêter les expériences »

— Le 20 mars 2020
Pour Christian Gianese, responsable du plus grand liquéfacteur d’hélium de France, l’arrêt brutal des expériences signifie stocker une quantité gigantesque de ce gaz en un temps très court. 

Aviez-vous anticipé l’arrêt complet des expériences ? 


Oui, nous l’avions anticipé depuis une dizaine de jours. Il faut savoir que notre plateforme produit 400 000 litres d’hélium liquide par an. La moitié est pour l’institut Néel, le reste approvisionne des structures privées ou publiques dans toute la région. La récupération de l’hélium “chaud” [c’est-à-dire au-dessus de 4°K, NDLR] est cruciale étant donné que son prix a été multiplié par quatre en deux ans. 

Comment s’est passé l’arrêt ? 


Ça a été un crève-cœur d’arrêter les expériences à basses températures souvent longues à mettre en place, mais les chercheurs ont joué le jeu. Entre vendredi et lundi, 60 à 80 expériences ont été stoppées. Elles se réchauffent toutes au même moment et l’ensemble du gaz est ramené vers le centre de liquéfaction. Dans ces circonstances exceptionnelles, la question était : aurons-nous assez d’espace pour stocker tout cet hélium gazeux ? Nous avons eu de la chance car nous n’avions pas été ravitaillé récemment, nous pouvions donc tout stocker.

Il n’y a donc plus personne au labo maintenant ? 


Beaucoup de paramètres peuvent être suivis en temps réel de la maison mais pas tous. Tous les deux jours, une personne de notre équipe se rendra sur place. Le reste du labo est vide. J’ai fait le tour avec le directeur avant de fermer. D’habitude, même le weekend, on entend tous les appareils, les pompes à vide, qui fonctionnent. Là, c’était très impressionnant de voir ces 27 000 m² sans personne mais surtout sans aucun bruit ! Et sans savoir quand nous pourrons revenir…

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