Entre deux tours (entre deux eaux)

20.04.2022 • LA RECHERCHE ET SA POLITIQUE


Tempêtes sous des crânes

Crépusculaire. Difficile de penser à autre chose qu’au second tour de dimanche prochain. Le match retour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen obnubile les gazettes, la nôtre y compris. Cinq ans après, les états d’âmes de l’ESR s’exposent à nouveau.

Les matins qui chantent. C’est donc sous le joug de cette actualité que nous inaugurons le premier numéro de TMN Mercredi, une newsletter revue et repensée que vous recevrez tous les mercredis (ou presque). À votre écoute pour toutes les remarques qui vous passeraient par la tête.

Point d’orgue. Vous recevrez vendredi prochain un dernier numéro de notre verticale spéciale #ParlonsRecherche (lire les épisodes précédents) avec une analyse des programmes respectifs de Marine Le Pen et Emmanuel Macron côté recherche et les réponses aux questions que vous leur avez posées.


A très vite, 
— Laurent de TheMetaNews.

PS

Une réaction ? Nous la publierons. N’oubliez pas que les colonnes de nos courriers des lecteurs vous sont ouvertes. Il suffit de répondre à ce mail (ou à n’importe quel autre) et de nous livrer le fond de votre pensée.

Sommaire

→  ÉLECTIONS Des mots d’ordre en ordre dispersé
→  LA VIE DE L’ESR Le Journal officiel passé au crible
→  BRÈVES  Pendant ce temps dans la recherche
→  EXPRESS  Votre revue de presse 
ET POUR FINIR Après Marie Curry, Freddie Mère Curie

TEMPS DE LECTURE : 4 MINUTES

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ÉLECTIONS

Des mots d’ordre en ordre dispersé


La perspective renouvelée de voir le Rassemblement national gagner le second tour déclenche de nombreuses réactions.

→ Dans l’isoloir. Faut-il glisser un bulletin Emmanuel Macron dans l’urne le 24 avril ? Cette question que nombre de Français se posent traverse tout le milieu de la recherche et de l’enseignement supérieur depuis une dizaine de jours. La réponse tient en majorité en ces quelques mots : « faire barrage à l’extrême droite ». Pas un soutien explicite pour le candidat sortant, donc mais un pis-aller que beaucoup assument.

« Une partie des militants ne déposeront pas un bulletin Macron dans l’urne. »

Philippe Aubry, Snesup-FSU

→ Le choix des mots. Du côté de certains syndicats en particulier, l’accord autour des mots d’ordre semble avoir été particulièrement dur à trouver. En 2017, le Snesup-FSU appelait à « utiliser le bulletin de vote Macron ». Cinq ans plus tard, après un quinquennat marqué par une Loi de Programmation de la recherche aux mesures contestées et des polémiques à répétition, le soutien est beaucoup moins explicite : « Aucune voix ne doit aller à M. (sic) Le Pen ». Côté collectif de chercheur, RogueESR maintient le « silence radio » faute d’être arrivé à décider d’un mot d’ordre commun.

Sans retenue. En réalité, parmi les syndicats, seule la CFDT a explicitement (et immédiatement) appelé à voter pour le candidat sortant. Si les polémiques, notamment sur l’islamogauchisme, ont laissé des traces, France Universités (ex-CPU), une des premières institutions à avoir dégainé son communiqué, appelle également à « combattre l’extrémisme que porte la candidature de Marine Le Pen et à voter pour Emmanuel Macron ».

Mobilisation générale. Il faut dire que les réseaux macroniens ont battu le rappel entre les deux tours, notamment grâce à Louis Vogel, référent thématique pour La République en marche et ex-président de la CPU, qui a diffusé une pétition finalement signée par plus 150 universitaires et publiée le 15 avril dernier dans Le Journal du Dimanche. Parmi les signataires, de nombreux présidents d’université.

Discrétion. Si certains comme la présidente de Nantes Université Carine Bernault ont même jeté un pavé dans la mare en utilisant les canaux académiques pour diffuser leur mot d’ordre, d’autres comme Udice (représentant les Idex) précise que « chaque président prendra position s’il le souhaite à titre personnel ». Même son de cloche pour la Conférence des grandes écoles ; plus explicite, la Cdefi, représentant les écoles d’ingénieurs, « fait part de son désaccord profond avec le projet de société porté par le Rassemblement national et sa candidate et appelle à en tirer toutes les conséquences » le 24 avril.

→ En grande pompe. L’enseignement supérieur et la recherche, dont le vote semble pencher à gauche (sans qu’aucune étude que nous n’ayons pu consulter ne l’atteste) aurait objectivement tout à perdre à l’élection de Marine Le Pen le 24 avril. Si ce scénario que beaucoup considèrent comme une catastrophe devient réalité, les chercheurs, enseignants chercheurs et étudiants se réveilleront dans un monde inconnu le 25 avril.

EXPRESS

C’est la vie de l’ESR


→ Le journal officiel au pas de course. Des vacances d’emploi de maîtres de conférence et de PU-PH en odonto, pharma et médecine mais aussi de professeurs et de MC en médecine générale ; on connait par ailleurs les taux de promotion dans chaque classe pour 2021 • L’université Aix-Marseille est autorisée à accepter la donation de la Fondation Banque de France pour la recherche en économie monétaire, financière et bancaire, le BRGM celle de la région Nouvelle Aquitaine, l’Institut de France celle de la Fondation Biomérieux • Ça recrute à l’Inrae : 50 techniciens de la recherche de classe normale, huit adjoints techniques principaux de seconde classe, 18 assistants ingénieurs, 41 ingénieurs d’étude de classe normale, 16 ingénieurs de recherche de seconde classe • On recrute un bibliothécaire assistant spécialisé à l’Université d’Angers • Des concours de recrutement de techniciens de formation et de recherche relevant du ministre chargé de l’agriculture sont ouverts • Le montant apporté par l’ANR à chaque projet associé à une chaire de professeur junior est de 200 000 euros et maintenant c’est officiel • L’Institut universitaire de France change son règlement intérieur • Les orientations stratégiques en matière de politique de prévention des risques professionnels ont été publiées •


→ Ils changent leur carte de visite. Treize nominations au sein du conseil scientifique de l’InsermSilvia Sebastiani est nommée membre du conseil scientifique du Muséum national d’histoire naturelle en qualité de personnalité qualifiée • Didier Leschi est renouvelé à la présidence du conseil de direction de l’Institut d’étude des religions et de la laïcité • Cyril Moulin, titulaire, et Guilhem de Robillard, suppléant, sont nommés au conseil d’administration de l’Institut national de recherche en informatique et en automatisation (Inria) • Gilles Roussel est nommé président du comité éthique et scientifique de la plateforme Parcoursup, Marie-Elisabeth Borredon en est nommée membre • Mehdi Gmar quitte le cabinet de Frédérique Vidal, tout comme Yann Jacob auparavant conseiller en charge des relations avec les collectivités • On connait la nouvelle composition de l’instance chargée de l’avancement en grade des enseignants chercheurs • Bruno Guiderboni est renouvelé en tant que directeur de l’Observatoire de LyonAnne Puech est nommée membre suppléante du conseil scientifique de l’Inrae • Guilhem de Robillard est nommé membre suppléant du conseil d’administration de l’Inserm • Une petite trentaine de nominations à l’Académie des technologies ont été adoptées • On connait le jury des membres juniors de l’Institut universitaire de France • Christelle Aupetit-Berthelemot est nommée directrice de l’école d’ingénieurs Ensil-EnsciFrançois Mignard est nommé président du Bureau des longitudes, Luc Blanchet vice-président, Félicitas Arias, secrétaire • Voici la liste des anciens auditeurs de l’Institut des hautes études pour la science et la technologie

EXPRESS

Pendant ce temps dans la recherche


→ Vous avez dit SAPS ? Pendant les élections, le ministère turbine toujours : douze nouveaux établissements ont été labellisés « Science avec et pour la société », pour un total de trois millions d’euros. L’Université de Bordeaux récolte à elle seule 481 000 euros. Le forum national du 07 avril rue de la Montagne Sainte-Geneviève a permis de poser la question de l’évaluation de cette nouvelle politique entérinée par la loi de programmation de la recherche. Sans solutions évidentes pour le moment.

→ À but lucratif. C’est la fin d’un marathon judiciaire qui a opposé un chercheur d’Aix Marseille Université et son établissement depuis 2013. Le Conseil d’État a statué début mars (cela nous avait échappé) en maintenant la sanction initiale à l’encontre du chercheur après de multiples recours. Ce dernier écope d’un an d’interdiction de recherche et de la privation de la moitié de ses traitements pour avoir “omis” de déclarer diverses activités fort bien rémunérées.

→ Vous avez dit deeptech ? Environ 5% des brevets déposés en Europe en 2021 l’ont été par des universités ou des organismes publics de recherche (grâce à leur filiale de valorisation), relève le Patent index 2021. En France, le CEA (2e) et l’Inserm (8e) se classent parmi les plus gros “déposeurs” de brevets, la première place étant dévolue à Safran. L’Hexagone est bien positionné sur les transports, la biotech et l’informatique.

Oiseaux rares. On connait les quatre premières “disciplines rares” en France : le génie papetier, la néphro-oncologie, la musique appliquée aux arts visuels, l’otoneurologie vestibulaire. Le ministère a engagé, il y a plusieurs mois, un travail de recension à l’instar des Allemands avant nous. Reste maintenant à prendre des mesures pour les soutenir.

EXPRESS

Votre revue de presse


→ Pire que le mal. Les sanctions scientifiques contre la Russie sont-elles contre-productives ? De nombreuses voix s’élèvent contre les blocus intellectuels décidés après le début de la guerre (récemment l’Allemagne a annoncé une série de rétorsions), dont celles des politologues Stéphanie Balme et Pierre Lemonde dans Le Monde.

→ Plainte baillon. Le chercheur Alexandre Dézé a critiqué un sondage de l’Ifop à propos des attentats de Charlie Hebdo dansO cet article du Monde le disant entaché d’un « faiblesse méthodologique délirante ». L’Ifop ne l’entend pas de cette oreille et a porté plainte pour diffamation contre le dit chercheur, rapporte le quotidien Libération. Affaire à suivre.

Cinéma, cinéma, tchitcha. Le site spécialisé Intelligence Online relève que le chercheur René Bigey, qui aurait pointé les relations du député Buon Tan avec la Chine dans ce rapport publié en mars et cité par des médias comme Le Monde n’existe tout simplement pas. Reste à comprendre pourquoi avoir créé cet avatar qui porte le nom d’un personnage de François Truffaut dans Les 400 coups.

RADIUM GA GA

Et pour finir…


Les blagues internet mettant en scène Marie Curie vont devenir un genre à part entière. On avoue un gros faible pour celle-ci, à la fois pour le jeu de mot et le montage photo vraiment expert.