Non, pas cette retraite (enfin pas tout de suite)
Rédiger est-il inné ? Certainement pas ! C’est avant tout un processus d’observation et de reproduction, comme le souligne Aurélie Landon, de l’association ParenThèse. Si les doctorants en sciences humaines font déjà cette expérience de la solitude, les perturbations dans la vie des labos depuis la Covid ont étendu ces difficultés à toutes les disciplines.
Ça ne date pas d’hier. D’où cette idée d’organiser l’entraide en dehors du labo. C’est le principe des writing centers, qui existent aux Etats-Unis depuis plusieurs décennies ; ils ont même une revue à leur nom. Sans interférer avec les travaux de recherche, des tuteurs accompagnent les aspirants chercheurs dans le processus de rédaction.
Ca arrive doucement en France. Notamment par l’intermédiaire de Thèsez-vous, une association canadienne créée par des doctorants en sciences de l’éducation. Ils développent depuis six ans des méthodologies ou des accompagnements en distanciel depuis le lieu de vacances, autant sur la structuration du manuscrit que sur l’organisation du temps. Ces méthodes essaiment aujourd’hui en France.
On n’arrête pas les jeux de mots. C’est ainsi qu’en 2018 est née la première antenne régionale de ParenThèse en Occitanie. Cette association à but non lucratif a ensuite fait des petits : Bretagne, Île-de-France… pour en compter bientôt huit. Un noyau dur de 50 bénévoles propose aujourd’hui des ateliers d’une journée mais aussi des retraites sur quelques jours.
Rencontres. Florine Truphemus, aujourd’hui présidente de ParenThèse Ile-de-France, a justement connu l’association via une journée de rédaction alors qu’elle était tout juste en première année de thèse. Briser l’isolement est en effet l’un des objectifs de l’association.« En SHS, la rédaction se fait au fur et à mesure et il y a un fort besoin de rencontrer d’autres doctorants. »
Le pouvoir du collectif.Transmettre des méthodes pertinentes et offrir un cadre propice sont également au programme de ces retraites. Les doctorants sont hébergés et déchargés des tâches quotidiennes pour se consacrer à l’écriture durant trois jours. Au rythme des pomodoros (qu’est-ce donc ?), l’émulation aide à vaincre la procrastination.
Et les doctorants en redemandent. En avril dernier, les places se sont arrachées en moins de 48 heures et les doctorants attendent avec impatience la prochaine retraite. Toujours en perfectionnement de ces méthodes importées d’outre-atlantique, Florine Truphemus aborde de son côté sereinement la rédaction de sa propre thèse de droit, qui durera au moins un an.
Les labos parlent aux labos
Pouvoir s’inspirer de la démarche d’autres laboratoires, c’est l’objectif du nouveau réseau des laboratoires en transition qu’a lancé Labos 1point5, adressé aux labos pilotes, mais aussi et surtout à tous les autres. La seule condition pour y entrer : avoir réalisé au moins un bilan de ses émissions sur au moins un poste – déplacement, bâtiments, achats. Céline Serrano, ingénieur de recherche Inria, le coordonne avec Marie-Alice Foujols : « Après le BGES, les référents peuvent avoir un sentiment d’isolement, voire de découragement, qu’on souhaite briser ». « Au départ, on a l’impression d’être face à une énorme montagne. Voir que c’est possible ailleurs aide quand on a l’impression de ramer », confirme Sophie Schbath, co-animatrice du réseau. Pour Alexandre Santerne, c’est avant tout un travail d’équipe : « Les actions et l’énergie de toutes et tous sont indispensables ». Depuis le webinaire de mai, un canal d’échange regroupe plus d’une centaine de personnes et le développement d’une plateforme est en cours, prévue pour fin 2023. Celle-ci rassemblera les fiches de chaque laboratoire qui le souhaite avec leurs BGES, leurs actions, leurs scénarios, leurs spécificités… et permettra de rechercher par discipline, zone géographique ou taille pour comparer les démarches et échanger. « Les labos aident les labos », parie Labos 1point5.