Vincent Larivière : « La Chine a réalisé l’ampleur du problème »

Vincent Larivière et ses collaborateurs ont analysé la transmission des connaissances sur le Covid-19. Ils dénoncent les dysfonctionnements du système de publication.

— Le 13 mars 2020

Crédit photo : Amélie Philibert

Suite à l’appel du Wellcome Trust, de nombreuses publications portant sur le covid-19 ont été mises en accès ouvert. Est-ce suffisant ? 

La réponse a été rapide mais je pense qu’il s’agissait avant tout d’un exercice de relation publique de la part des maisons d’éditions. Elles ont vu là l’opportunité de gagner en capital sympathie. Mais si elles avaient vraiment à cœur le partage de la connaissance, elles ouvriraient l’accès à toutes les publications sans attendre une autre crise.

Quel rapport entre le Covid-19 et la décision du gouvernement chinois de ne plus payer de primes à publication ? 

Fin 2019, après avoir constaté à Wuhan les premiers cas, les chercheurs chinois sont rentrés à Beijing et qu’ont-ils fait en premier ? Ils n’ont pas préparé un document en chinois pour alerter les autorités mais ont rédigé un article en anglais pour le soumettre dans une grande revue et toucher la prime à la publication. Comme si c’était une recherche comme les autres, qu’elle n’avait pas de conséquence. Le gouvernement chinois a réalisé l’ampleur du problème et change maintenant de paradigme.

Mais n’est-il pas aussi nécessaire de publier en anglais pour rendre accessible les résultats à la communauté internationale ? 

Avoir une langue commune n’est en réalité pas très ancien. Lorsque Einstein a publié sur la relativité générale en 1911, il l’a fait en allemand. Et tout le monde s’est bien débrouillé pour le traduire. Aujourd’hui, le poids repose uniquement sur les épaules des non-anglophones, alors qu’on dispose d’outils de traduction assez efficaces. Et surtout, il y a des conséquences : une langue apporte sa culture et ses biais. Le choix de la langue commune est avant tout politique.

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