🍀 On vous parle des femmes invisibles




6 novembre 2020 /// L’actu des labos
Fake news,
fake president ?

Tout le monde a les yeux rivés sur les Etats-Unis et l’élection présidentielle. Le suspense devrait être levé dans quelques heures.
En tant que scientifique ou journaliste, ce qui marque, évidemment, ce sont les mensonges de Donald Trump. Mais quelles seront les conséquences des résultats sur la recherche ? Nous enquêtons pour la semaine prochaine.
En attendant, place aux femmes ! Et rappelez-vous que pendant un mois 1+1=1000.
Bonne lecture,
Lucile de TMN

PS. Vous aussi, vous trouvez que ce second confinement est étrange ? La physicienne Pérola Milman, elle, en vient à regretter le premier !



Cinq minutes de lectures bien visibles



Ces femmes qu’on ne saurait voir


De la discrimination systémique à la discrimination positive, compte-rendu de la table ronde sur l’invisibilité des femmes dans la science au festival Pariscience.


Le problème ? On n’en voit que la partie Ă©mergĂ©e.
En guise d’intro. Mettons les pieds dans le plat : un prix Nobel 2020 de chimie 100% fĂ©minin, est-ce vraiment une bonne nouvelle ? demande la journaliste Giulia FoĂŻs, spĂ©cialiste des sujets de genre, qui a animĂ© ce dĂ©bat au festival Pariscience. RĂ©ponse  : oui et non. Oui car il faut des modèles fĂ©minins… Et non car les choses auront vraiment avancĂ© quand on ne se rĂ©jouira plus que ce soit une femme.
Excellents messieurs. Une partie du problème se situe dans les comitĂ©s de sĂ©lection, selon Martina Knoop, physicienne au CNRS. Les critères d’excellence ne sont en effet pas les mĂŞmes selon le sexe. Les hommes sont plus habituĂ©s Ă  se mettre en avant alors qu’« on attend des femmes qu’elles soient organisĂ©es, sages, soigneuses… Elles font donc des dossiers diffĂ©rents et sont jugĂ©es diffĂ©remment ».
« J’ai été très surprise par le niveau de déni dans la recherche académique. »
Alexandra Palt, L’OrĂ©al
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Pas de ça chez nous. Les tabous autour du sexisme sont plus fort dans la recherche acadĂ©mique qu’en dehors, selon Alexandra Palt : « J’ai Ă©tĂ© très surprise par le niveau de dĂ©ni [dans la recherche publique] il y a des choses qu’on ne pourrait plus se permettre dans le secteur privĂ© ». Les raisons ? La verticalitĂ© de la culture acadĂ©mique : un ĂŞtre faisant partie de l’élite, objectif et rationnel, ne pourrait pas se rendre coupable de discrimination. Sauf que…
Comme un iceberg. Le sexisme ordinaire existe bel et bien en sciences, même s’il reste moins visible que les actes graves d’agressions sexuelles. Un exemple ? Le documentaire Picture a scientist retrace  l’histoire d’une doctorante harcelée moralement par son encadrant – le géologue David Marchant, licencié depuis. « On a besoin de mettre des mots », ajoute Laura Mary, à l’initiative de Paye ta Truelle.


Quatre femmes autour de la table
Martina Knoop. Physicienne, elle est investie dans de nombreuses missions au CNRS comme la coprĂ©sidence du comitĂ©-paritĂ©-Ă©galitĂ© en 2018. Elle est aussi membre de l’association Femmes & Sciences.
Laura Mary. ArchĂ©ologue-restauratrice de matĂ©riel archĂ©ologique, elle est Ă  l’origine de Paye ta truelle. Le site accueille les tĂ©moignages de discrimination de genre et s’est rĂ©cemment transformĂ© en une expo, ArchĂ©o-Sexisme.
Alexandra Palt. Juriste de formation, elle occupe depuis 8 ans des postes Ă  responsabilitĂ© chez L’OrĂ©al. Son engagement pour une meilleure place des femmes dans la science est bien connu, via les prix L’OrĂ©al-UNESCO. 
Marylène Patou-Mathis. PrĂ©historienne rattachĂ©e au MusĂ©um national d’histoire naturelle, cette directrice de recherche (CNRS) vient de sortir un livre qui retrace l’histoire de l’invisibilitĂ© des femmes.


Biais invisibles. La surreprésentation masculine dans la recherche a des conséquences tangibles. Du dosage des médicaments à la reconnaissance faciale, les exemples ne manquent pas. Les biais sexistes induisent des usages non adaptés aux femmes ou à d’autres minorités. Et le ras-le-bol augmente : « Je ne laisse plus passer ce que j’aurais laissé il y a vingt ans », affirme Alexandra Palt.
« Plus besoin de sensibiliser, il faut passer à la vitesse supérieure. »
Martina Knoop, préhistorienne
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Le mythe de l’auto-censure. « On dit aux femmes qu’elles sont responsables de leur discrimination. C’est le pompon ! », s’exclame Alexandra Palt. « L’auto-censure, c’est un piège et c’est culpabilisant », ajoute Marylène Patou-Mathis, prĂ©historienne et fait oublier des discriminations plus systĂ©miques. Le plafond de verre ne se brisera pas tout seul : prĂ´ner la mĂ©ritocratie n’est en tous cas plus suffisant. 
Les mots ne suffisent plus. On en arrive au nerf de la guerre : comment recruter autant de femmes que d’hommes ? Presque toutes sont d’accord : plus besoin de sensibilisation, « il faut passer Ă  la vitesse supĂ©rieure », affirme Martina Knoop. La discrimination positive apparaĂ®t alors comme indispensable. Un quota de 40 % de femmes pour tous les recrutements pourrait ĂŞtre un point de dĂ©part, faut-il dĂ©jĂ  qu’on l’atteigne !


Qui a peint Lascaux ?

Des guerrières aux scientifiques. La prĂ©historienne Marylène Patou-Mathis combat elle les prĂ©jugĂ©s de l’histoire : du divin au biologique, que d’arguments pour minimiser le rĂ´le des femmes… « On n’a jamais prouvĂ© que la grotte de Lascaux avait Ă©tĂ© peinte par des hommes mais il faudrait prouver qu’elle aurait pu l’ĂŞtre par des femmes ! ». De la mĂŞme façon, les innovations ont toujours Ă©tĂ© attribuĂ©es par dĂ©faut aux hommes – c’est l’effet Matilda.


Un chiffre plutĂ´t qu’un long discours
 +2,5% 
C’est la croissance de l’emploi scientifique – l’ensemble des personnes travaillant directement sur des projets de recherche et de dĂ©veloppement – en France en 2018. Vous ne serez pas surpris de l’apprendre, celle-ci « est entièrement portĂ©e par les entreprises, avec une hausse de 4,0 % », dĂ©taille le nouveau rapport du MESRI. Dans les Ă©tablissements publics, les chiffres varient entre 0,0% et 0,1%.


Un outil dans la boîte
Auteur, vous avez des droits ! 


Etes-vous auteur sans le savoir ? Le ComitĂ© pour la science ouverte dĂ©cline 35 conseils sur les droits (et les devoirs) qui sont liĂ©s Ă  ce statut, en un effort salutaire de simplification (et en intĂ©grant les nouveautĂ©s liĂ©es Ă  la loi sur le numĂ©rique de 2016). On n’y parle pas de royalties (malheureusement).


Des infos en passant //////// Pour rester dans le thème, l’ANR et le Cirad co-organisent un colloque sur « Le genre en recherche ». Ce sera le mardi 15 dĂ©cembre //////// TĂ©moignage d’un doctorant qui aimerait bien ĂŞtre son propre encadrant //////// RentrĂ©e littĂ©raire : le prix Femina essai pour l’historien Christophe Granger  //////// 22 projets autour de la science ouverte viennent d’être sĂ©lectionnĂ©s. Le Fonds national pour la science ouverte (FNSO) distribue plus de 2 millions d’euros ////////


//////// Vous avez de nouvelles idĂ©es sur le preprint ? Venez « pitcher » (ou Ă©couter les autres le faire) le 13 octobre //////// Interconnexion suspendue Ă  gare du nord… euh non pardon elle est mise en place entre HAL et Orcid  //////// Un chercheur rĂ©voquĂ© en 2017 pour harcèlement sexuel, soutenu par Didier Raoult, tente maintenant de vendre des Ă©lixir de jouvence  //////// Concours d’innovation i-PHD, I-Lab, i-Nov… la remise des prix, c’est lundi 9 novembre //////// 


Votre revue
de presse express



Et pour finir…
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DĂ©jĂ  marre des attestations ? Cette sĂ©quence « TamponnĂ©, double tamponné » issue de la sĂ©rie Au service de la France., qui dĂ©crit des espions phagocytĂ©s par les lourdeurs administratives rĂ©sonne dans l’actualitĂ©. N’y voyez aucun parallèle avec la recherche ! (quoique…)