Faut-il construire le FCC ?

14.03.2025 • N° 488 • LA RECHERCHE ET SA PRATIQUE


Vers l’infini et au-delà !

Infiniment petit. De quoi est constituée la matière à l’échelle la plus élémentaire ? Qu’il y a-t-il dans l’Univers depuis sa création ? Ces questions passionnent depuis toujours les physiciens – dont j’ai fait partie.

Infiniment grand. Contrairement à d’autres disciplines où des expériences à taille humaine peuvent être développées en quelques mois, la physique des particules nécessite des infrastructures gigantesques, planifiées sur des années.

Infiniment questionnable. Alors quand est annoncée la construction d’un nouvel accélérateur en pleine crise écologique, les interrogations ne manquent pas : l’investissement en vaut-il le coup ? Quel sera son coût environnemental ? La société est-elle prête à l’accepter ?

On compte les points. Voici une partie des questions que soulève le nouveau projet du Cern à Genève, le plus grand centre de physique des particules au monde. Les Scientifiques en rébellion s’en sont mêlés et nous analysons les positions de chacun dont nous vous proposons la première partie cette semaine.

Bonne lecture, 
— Lucile de TheMetaNews

Sommaire

→  ANALYSE  Le Cern, en étau entre deux idéaux
→  OUTIL  Le “violentomètre” du doctorat
→  CHIFFRE  Les différences de salaires hommes-femmes
→  EXPRESS  Votre revue de presse
→  ET POUR FINIR L’impact du cake-factor

TEMPS DE LECTURE : 5 ou 10 MINUTES

℗ Contenu réservé à nos abonné·es

ANALYSE

Le Cern, en étau entre deux idéaux

Plus grand, plus cher, plus performant : avant même l’éventuel premier coup de pelle, le projet de Future Circular Collider (FCC) déclenche un débat qui, signe des temps, est autant scientifique que sociétal.

   ↳ Les visites au Cern laissent toujours une forte impression, qu’on soit physicien ou pas. Lorsque la “machine” est à l’arrêt, il est possible de descendre à une centaine de mètres de profondeur marcher le long de “l’anneau”, dans un tunnel qui s’étend sur 27 kilomètres de circonférence autour de Genève (…)

OUTIL

Le “violentomètre” du doctorat

Des vertes et des pas mûres. Doctorant·e, vous n’êtes pas certain·e que la relation avec votre encadrant·e soit saine (ou vice-versa) ? Pour vous guider, voici le violentomètre du doctorat (certainement inspiré du violentomètre pour les femmes dans la recherche). Conçu par le collectif Ecume (Encadrer c’est un métier), il permet de mesurer « la qualité de la relation entre les doctorant·es et leurs encadrant·es » afin de détecter d’éventuels dysfonctionnements. On espère que vous resterez dans le vert !

EXPRESS

Pendant ce temps dans les labos

● Sages femmes. Les équipes menées par des femmes (plutôt que par des hommes) auraient moins de risque de voir une de leur publication rétractée, conclut une analyse publiée dans Quantitative Science Studies par une équipe de sociologues – menée par un homme, Michel Dubois, que nous avions interviewé. Les causes des rétractations varient également selon le genre : plus de manquements éthiques et à l’intégrité sont observés quand un homme signe en dernier auteur alors que les erreurs sont plus fréquentes quand c’est une femme. Si les sociologues se gardent bien de prêter une « nature » plus vertueuse à ces dernières, ils invitent dans The Conversation « à être attentif à la façon dont les hommes et les femmes exercent, dans les collaborations scientifiques, leur responsabilité d’encadrement ».

● La moula. Accepteriez-vous plus facilement de reviewer un papier si vous étiez payé ? Des chercheurs nord-américains en santé ont mené l’expérience au sein de la revue Critical Care Medicine, envoyant à 700 de leurs collègues des demandes de peer review dont un peu plus de la moitié avec la promesse d’une récompense financière (250 dollars). Résultat : peu de différence dans l’acceptation des reviewers (53% avec récompense contre 48% sans), légèrement plus dans le rendu réel du rapport (50% contre 42%) et avec un peu plus de rapidité (11 jours contre 12) mais pas de différence dans la qualité. Vous n’êtes donc pas vénaux (ouf!).

  Mais aussi…   L’effet Matilda synthétisé en 38 minutes de vidéo diffusée par le ministère de la Recherche, avec Élisabeth Bouchaud (nous avions fait son portrait) ainsi que des extraits de ses pièces de théâtre sur les femmes invisibilisées dans les sciences Le CNRS lance une consultation à destination du grand public sur la place des mathématiques dans la société française, ouverte jusqu’au 30 avril Sorbonne Université dévoile SorbonNum+, un espace numérique dédié à ses collections scientifiques comme celles de la Station biologique de Roscoff ou de l’Institut d’art et d’archéologie Vous allez au labo à vélo (relire notre analyse) ? Participez à la consultation pour le baromètre du vélo 2025 !

CHIFFRE

372 euros

À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, le ministère analyse et publie les données 2023 sur l’égalité (ou plutôt les inégalités) hommes-femmes. Les écarts de salaire entre hommes et femmes à l’université se montent à 372 euros brut par mois pour les enseignants-chercheurs et 292 euros parmi les ITRF (Ingénieurs et personnels techniques, de recherche et de formation). Côté organismes de recherche, les écarts sont moindres : 167 euros parmi les chercheurs et 99 euros chez les ingénieurs, techniciens et administratifs (ITA). Sans compter les tâches moins gratifiantes souvent prises en charge par les femmes : nous vous en parlions lors de nos interviews d’Hélène Gispert sur l’effet Matilda et de Fanny Gallot sur l’excellence scientifique et ses effets genrés.

EXPRESS

Votre revue de presse

→ À bon port. Aix-Marseille Université a lancé Safe Place For Science, un programme pour accueillir des collègues fuyant les États-Unis. Andrea, spécialiste des maladies infectieuses et des épidémies, est la première à être arrivée, signale FranceInfo, et d’autres demandes ont déjà été reçues, précise l’université. Dans une interview au Monde, la politiste Katrin Kinzelbach revient sur les attaques de la science par Donald Trump ↯.

→ Majorité. Les serveurs de preprint bioRxiv et medRxiv changent de propriétaire, passant du Cold Spring Harbor Laboratory (organisme privée de recherche) à une structure nommée openRxiv, toujours à but non lucratif. Une passation qui promet plus d’indépendance mais également plus d’incertitudes financières, alors que la fondation Chan Zuckerberg Initiative reste le premier donateur, analyse Science Nature en parle également ↯.

→ Valises. Alors que les États-Unis durcissent les conditions de séjour pour les chercheurs étrangers, Nature revient sur la situation analogue des chercheurs étrangers en Chine depuis la Covid, que beaucoup ont fui ↯.

→ Double tranchant. L’IA peut-elle détecter les erreurs dans les papiers soumis pour publication ? Nature analyse deux initiatives en ce sens ↯ : The Black Spatula Project et YesNoError. Si un tel outil pourrait accélérer le processus de relecture, certains chercheurs craignent que des papiers soient signalés à tort.

↯ : liens menant à des articles protégés par un paywall

L’IMPACT DU CAKE-FACTOR

Et pour finir…

Et si la meilleure façon d’évaluer les labos était le nombre… de gâteaux partagés entre collègues ?