Ils ont publié dans des revues prédatrices

30.06.2023 • LA RECHERCHE ET SA PRATIQUE


Un ami qui vous veut du bien

Cluedo. Qui publie dans les revues prédatrices ? Pas vous, c’est certain ! D’autant que si vous lisez TMN, vous savez que vos petits écarts dans les revues de MDPI reste dans la zone “grise” de l’édition scientifique.

Loupe au nez. N’est pas prédatrice toute revue qui vous demande de l’argent contre publication – autrement dit des article processing charge (APC) ? m’a demandé, surprise, une chercheuse au hasard d’une conversation. C’est en effet la définition qu’avait choisi le chercheur Björn Brembs.

Suicide collectif. Malheureusement, payer pour publier n’est pas un phénomène en voie de disparition, au contraire. Qui sait combien de temps nous resterons au bord du gouffre – pour reprendre les mots d’Alain Schuhl dans le journal du CNRS – avant de tomber. 

Coupables victimes. Extrêmement inégalitaire, le système pénalise bien évidemment les chercheurs des pays les plus pauvres – globalement au sud – et ces derniers deviennent les principales victimes – ou parfois complices – de ces revues prédatrices.

Portrait-robot. Comment peut-on tomber dans le panneau ? Quels avantages peut-on tirer des revues prédatrices ? Une étude dépeint les profils de chercheurs publiant dans ces revues et c’est le sujet de notre analyse de la semaine à lire absolument !

À très vite, 
— Lucile de TheMetaNews

Sommaire

→  ANALYSE  Victimes ou complices ? Ils publient chez les prédateurs
→  OUTIL  Fichier bien nommé, fichier retrouvé
CHIFFRE Des financements remboursés
→  EXPRESS  Votre revue de presse
→  ET POUR FINIR Pose créative

TEMPS DE LECTURE : 5 ou 10 MINUTES

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ANALYSE

OMICS ou le paradoxe des revues prédatrices

Victimes innocentes ou complices cyniques… une étude dresse les portraits-robots de ces chercheurs, tous soumis au “publish or perish”, qui ont publié dans des revues prédatrices.

   ↳ « Le temps de traitement a été rapide. La communication Whatsapp était excellente. » Voici un des nombreux témoignages recueillis lors d’une enquête interrogeant les chercheurs suite à leur publication dans des revues prédatrices éditées par le groupe indien OMICS – à ne pas confondre avec la revue du même nom. Après avoir identifié et contacté par email plus de 2200 auteurs, la chercheuse lyonnaise en sciences de l’information Chérifa Boukacem-Zeghmouri et ses collègues ont reçu une centaine de réponses, publiées dans le preprint Profiles, motives and experiences of authors publishing in predatory journals: OMICS as a case study (…)

OUTIL

Fichier bien nommé, fichier retrouvé

Charité bien ordonnée commence par soi-même : avez-vous des conventions précises et pérennes pour nommer et organiser vos documents et données ? DoRANum, la plateforme de formation en ligne sur la gestion et le partage des données de la recherche, rappelle les cinq règles de base pour nommer ses fichiers. En gros :

  1. Donner un nom bref et explicite du contenu : Guidelines, GrantProposal
  2. Pas d’espace ni de caractères spéciaux : séparer les mots par des underscores ou des majuscules
  3. Utiliser le format suivant pour les dates : AAAAMMJJ
  4. Placer l’élément le plus pertinent en premier (souvent la date) puis aller au moins pertinent
  5. Indiquer la version du document : article_v01 par exemple

La doctorante Kira Höffler résume ses astuces pour l’attribution de nom de fichier pour les données dans une infographie. Organiser les dossiers est aussi crucial et avoir une arborescence simple aide grandement. Un fichier Readme.txt permet donner plus d’information sur les données et retrouver la clé pour décoder les noms. L’université d’Edimbourg a également développé tout un Mooc à faire en autonomie sur l’organisation des données et qui aborde notamment l’attribution automatique de nom, le partage des données et la gestion de versions dans des stockage à distance – du cloud, autrement dit. Vous avez de quoi vous occuper pour les prochaines semaines !

CHIFFRE

Un million (de dollars)

C’est la somme qu’ont dû rembourser deux institutions étasuniennes – 850 000 dollars pour une troisième – à l’une des principales agences de financement du pays, la National Science Foundation (NSF), révèle un rapport publié par la Health Care Compliance Association. La cause ? Des liens non déclarés avec des institutions à l’étranger et, plus à la marge, pour des manquements à l’intégrité scientifique : fabrication ou manipulation de données, plagiat…  Près d’une vingtaine de prix ont également été retirés à des lauréats n’ayant pas été assez transparents. En 2021, un autre institut s’était vu assigner le remboursement de plus de 6 millions de dollars pour ses accointances avec la Chine. Des actions qu’on imagine pas facilement voir arriver en France.

EXPRESS

Des infos en passant

● Place à l’action. Répondre objectivement aux soupçons, enquêter suite à tout signalement sérieux et prendre les mesures nécessaires — le tout sans laisser filer le calendrier — forment les points clés du nouveau guide réalisé par le COPE, le Committee on Publication Ethics. Les éditeurs scientifiques n’ont plus d’excuses pour laisser lettre morte les interpellations des lanceurs d’alerte.

● Pot de fleur. La parité totale dans les comités de sélection, une fausse bonne idée ? Nous en parlions dans notre analyse sur les quotas pour les femmes, voici un exemple concret. La situation devient en effet absurde lorsque quatre mathématiciennes sont sollicitées pour participer à la sélection d’un poste de maître·sse de conférences… pour lequel aucune femme n’avait candidaté ! Les quatre chercheuses refusent de participer à un nouveau jury dans ces conditions, écrivent-elles dans une lettre à l’Université de Nantes.

EXPRESS

Votre revue de presse

→ Double face. Francesca Gino, une éminente chercheuse en psychologie de l’université Harvard fait face à des accusations de falsification de ses données de recherche, explique le quotidien américain The New York Times. Le comble ? Ses études portent sur la tricherie, le mensonge et la malhonnêteté. La chercheuse a été placée en congé administratif par l’université.

→ Froid dans le labo. La construction de nouveaux télescopes ainsi que l’expansion d’un détecteur de neutrinos au pôle Sud pourraient être retardées rapporte la revue Science. Un ralentissement qui inquiète les physiciens américains – et vous-même peut-être aussi.

→ Changements difficiles. Deux chercheuses partagent leurs expériences de la misogynie au sein de la communauté scientifique dans la revue Nature. Malgré des progrès notables, mais lents, quant à la présence des femmes aux postes de direction, elles dénoncent les différences de traitement faits entre les deux sexes, toujours bien présentes.

→ Duo de choc. L’agence de financement de la recherche suisse ne s’arrête pas d’innover. Alors que cette dernière proposait un système de loterie il y a quelques années – relire notre numéro spécial – son responsable Michael Colline préconise aujourd’hui un modèle basé sur des partenariats privé-public, explique la revue Nature.

— Revue de presse rédigée par Noémie Berroir

POSE CRÉATIVE

Et pour finir…

« Je pris un bâton noir terminé par une boule blanche, et je l’agitai en marchant devant l’écran… » Qui était le premier “lightpainteur” ?