Les millenials sont-ils accros à la citation ? Un article publié fin mai sur le rapport aux métriques bibliographiques de cette génération née entre le début des années 80 et la fin des années 90 est riche d’enseignement. L’étude est l’un des volets d’un projet de longue haleine, baptisé Harbingers, composé d’entretiens suivis sur trois ans et d’un questionnaire diffusé dans le monde entier (il y a un an TheMetaNews interviewait Chérifa Boukacem-Zeghmouri sur ce sujet). Elle permet notamment de comparer les habitudes des Français par rapport aux chercheurs de six autres pays.
Les Français se distinguent. Les « millennials » (ou génération Y), aujourd’hui pour la plupart en postdoc ou tout juste titularisés, utilisent largement les métriques basées sur les citations (impact factor, h-factor…) à la fois pour évaluer leur propre travail ou juger celui des autres. Mais si 61% les utilisent en moyenne à l’international, cette proportion est de seulement 39% en France. « Les Français sont clairement critiques, ils ont des modes de fonctionnement plus réflexifs », déclare Chérifa Boukacem-Zeghmouri.
Et les alternatives ? Les jeunes chercheurs français restent toutefois très méfiants par rapport aux « altmetrics » (voir encadré) : 80% des sondés ne les utilisent pas, contre 59% tous pays confondus. « C’est très facile de manipuler les métriques alternatives, je ne leur fais pas confiance. On peut facilement observer comment ces gadgets participent aux jeux d’influence », confiait l’un des Français interrogés durant l’enquête préliminaire.
L’exception française a du bon. Les Français restent attachés à la qualité des publications, quitte à produire moins. La tradition hexagonale de formation à la recherche et la politique d’évaluation moins agressive qu’au Royaume-Uni ou qu’en Chine les protège encore. « Un système d’évaluation basé uniquement sur les publications entraîne une véritable distorsion dans la recherche. Surtout lorsqu’on ne donne pas plus de moyens aux chercheurs pour travailler », conclut Chérifa Boukacem-Zeghmouri.
Les labos parlent aux labos
Pouvoir s’inspirer de la démarche d’autres laboratoires, c’est l’objectif du nouveau réseau des laboratoires en transition qu’a lancé Labos 1point5, adressé aux labos pilotes, mais aussi et surtout à tous les autres. La seule condition pour y entrer : avoir réalisé au moins un bilan de ses émissions sur au moins un poste – déplacement, bâtiments, achats. Céline Serrano, ingénieur de recherche Inria, le coordonne avec Marie-Alice Foujols : « Après le BGES, les référents peuvent avoir un sentiment d’isolement, voire de découragement, qu’on souhaite briser ». « Au départ, on a l’impression d’être face à une énorme montagne. Voir que c’est possible ailleurs aide quand on a l’impression de ramer », confirme Sophie Schbath, co-animatrice du réseau. Pour Alexandre Santerne, c’est avant tout un travail d’équipe : « Les actions et l’énergie de toutes et tous sont indispensables ». Depuis le webinaire de mai, un canal d’échange regroupe plus d’une centaine de personnes et le développement d’une plateforme est en cours, prévue pour fin 2023. Celle-ci rassemblera les fiches de chaque laboratoire qui le souhaite avec leurs BGES, leurs actions, leurs scénarios, leurs spécificités… et permettra de rechercher par discipline, zone géographique ou taille pour comparer les démarches et échanger. « Les labos aident les labos », parie Labos 1point5.