Pour un éloge de la fuite

26.03.2025 • N° 493 • LA RECHERCHE ET SA POLITIQUE


Envers et contre coût

Help me. On n’en finit plus de commenter les attaques de Donald Trump contre la science tant elles sont répétées. La sidération passée, la France veut maintenant témoigner d’un soutien « quoi qu’il en coûte » aux collègues américains.

If you can. C’est en tout cas en ces mots, qui rappellent ceux d’Emmanuel Macron il y a pile cinq ans, que la ministre de l’ESR Élisabeth Borne a appelé la France et l’Europe à être à la hauteur en organisant l’asile scientifique.

I’m feeling down. Rien que des mots ? Ces déclarations faisaient suite au lancement du programme pionnier Safe place for science d’Aix-Marseille Université mais leurs ambitions risquent maintenant de cogner à la situation budgétaire de notre pays et à son attractivité.

And I do appreciate. Dans notre interview de cette semaine, son président Éric Berton revient sur les enjeux, les origines et les objectifs de ce programme. Un premier scientifique a déjà été accueilli, combien suivront ?

— Noémie de TheMetaNews.

Sommaire

→  INTERVIEW  Accueillir des chercheurs américains avec Éric Berton
→  BRÈVES  Refoulé des States, Unys fait son nid 
→  LA VIE DE L’ESR  Ça recrute à l’Inrae et à l’Inserm
→  EXPRESS Votre revue de presse
ET POUR FINIR Goguenard en cuisine

TEMPS DE LECTURE : 6 ou 12 MINUTES

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INTERVIEW

« Il y a une véritable urgence à offrir cet asile scientifique »

Avec un timing parfait, Aix-Marseille Université a mis en place le programme Safe place for science pour accueillir les scientifiques étasuniens. Son président Éric Berton revient sur ses objectifs.

   ↳ Vous avez lancé le 6 mars le programme Safe place for science visant à accueillir les chercheurs étasuniens dont les domaines sont ciblés par la nouvelle administration américaine. Quelles ont été vos motivations ?

Ce qui se passe actuellement aux États-Unis est dramatique, autant pour les scientifiques que pour la société. Le gouvernement Trump jette des pans entiers de la recherche aux oubliettes, supprime des bases de données capitales, licencie à tout va, interdit l’usage de certains mots… C’est extrêmement choquant et brutal (…)

BRÈVES

Pendant ce temps dans la recherche


→ Como ESTA. L’affaire du chercheur français refoulé à son arrivée à Houston aux USA le 10 mars dernier tourne à l’imbroglio politico-scientifique. Lui étaient reprochées des prises de position personnelles sur ses appareils numériques qui, selon la France, auraient justifié son éviction, rappelle le ministre de la Recherche Philippe Baptiste sur France Info. Les Étasuniens arguent de leur côté par la voix de Tricia McLaughlin que ledit chercheur était en possession d’informations sensibles, selon le New York Times. Ambiance. De son côté le CNRS, par l’intermédiaire de son fonctionnaire sécurité défense (relire notre enquête sur les Zones à régime restrictif) alerte à nouveau les personnels sur les règles à suivre en cas de voyage aux USA : « La meilleure des solutions est de partir avec portable et PC dédiés aux missions, vides de toute messagerie et de tout document sensible (…) Il peut être reproché d’avoir sur ses conversations numériques des communications contestant les décisions gouvernementales ». Dystopie, vous avez dit ? 

Mur de fumée. Le 18 mars dernier, l’université de Lorraine et huit partenaires de recherche du territoire lorrain — le CNRS, le CHRU de Nancy, l’Inrae, l’Inria, AgroParisTech, Georgia Tech Europe, L’Incubateur lorrain et UL Propuls — ont lancé leur marque commune sous le nom d’Unys. « La science ne vaut que si elle est partagée. Il faut la rendre accessible au plus grand nombre », a appuyé Hélène Boulanger, présidente de l’université de Lorraine lors du lancement officiel. Leur objectif annoncé : créer un lien fort entre recherche et innovation et augmenter la visibilité de leur « dynamique collective » en place depuis plus de dix ans. Alors quel changement ? Un nouveau site internet rendra plus accessible leurs ressources pour les entreprises, les collectivités et les citoyens. De quoi susciter des réactions sur Bluesky.

→ Dernière minute.  Ce vendredi 28 mars, rendez-vous à la BNF (ou en visio) pour la journée Science et Médias centrée autour du thème « Journalistes et scientifiques, qui contrôle qui ? » • Le mouvement Stand Up For Science appelle à faire du jeudi 3 avril une deuxième journée de mobilisation nationale 

EXPRESS

C’est la vie de l’ESR


 → Le JO au pas de course. Deux séries de sanctions disciplinaires ont été émises par le Cneser (ici et ici• On recrute à l’Inrae : 89 techniciens de la recherche de classe normale, 27 ingénieurs de recherche, 45 ingénieurs d’études de classe normale, 7 adjoints techniques principaux de 2e classe, 40 assistants ingénieurs • Le concours national d’agrégation en histoire du droit est ouvert pour le recrutement des professeurs des universités • Des concours externes sur titres et travaux pour le recrutement de directeurs de recherche de 2e classe sont ouverts à l’Inserm pour pourvoir 50 emplois susceptibles d’être vacants • 

→ Ils réimpriment leur carte de visite. Quitterie CazesFrédéric CousinieJoana Cunha LealPeter Geimer et Jérémy Koering sont nommés personnalités qualifiées au conseil scientifique de l’Institut national de l’histoire de l’art • Catherine Lagneau est renouvelée dans ses fonctions de présidente du conseil d’administration du BRGM • Frédérique Berrod a été élue présidente de l’Université de Strasbourg ; elle succède à Michel Deneken, qui en était président depuis 2016. Ne reste plus qu’à élire les vice-présidents et vice-présidentes de l’établissement, ce qui devrait être fait le 1er avril prochain • 

→ Et si c’était pour vous ? Sont déclarées vacantes les fonctions de directeur (ou -trice) de l’Institut national des sciences appliquées Hauts-de-France • Les fonctions de directeur ou directrice de l’École européenne d’ingénieurs en génie des matériaux (EEIGM) de l’université de Lorraine sont déclarées vacantes au 1er septembre 2025 • 

EXPRESS

Votre revue de presse


→ Encore et toujours. La prestigieuse université new-yorkaise Columbia a finalement accepté d’engager les réformes drastiques demandées par l’administration Trump ↯ pour garder ses 400 millions de dollars de subventions fédérales, explique Les Échos. L’établissement s’est ainsi engagé à revoir sa gestion des protestations étudiantes, établir une définition de l’antisémitisme ou encore réformer des départements d’études sur le Moyen-Orient, l’Asie du Sud et l’Afrique. L’université de Pennsylvanie est elle aussi dans le viseur : la Maison Blanche a gelé près de 175 millions de dollars de subventions fédérales qui lui étaient déstinées pour punir la participation d’une athlète transgenre à son programme de natation, explique le HuffingtonPostFrance Culture revient sur cette guerre menée par l’administration Trump 2 contre la recherche.

→ Lumières éteintes. Dans une chronique dans L’Humanité, Pierre Serna revient sur la crise que traversent les universités autant aux États-Unis qu’en France. Pour l’historien, depuis la loi d’autonomie des universités de 2007 « tout est allé de mal en pis » pour le personnel administratif, les enseignants-chercheurs, les étudiants… 

→ Tirelire trouée. Le 11 mars dernier des chercheurs se sont mobilisés partout en France contre la baisse de budget dans l’ESR. Dans une tribune au NouvelObs, des chercheurs de l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne expriment leur inquiétude face à la brutalité et l’ampleur de ces réductions budgétaires.

→ Ras de marée. Les évaluations des établissements de la vague E du Hceres étaient elles aussi au cœur des mobilisations du 11 mars. Dans le quotidien Analyse Opinion Critique (AOC), le professeur Yves Citton appelle à s’interroger sur les prémices d’attaques contre certaines formes d’enseignement et de recherche ↯ issues des arts, lettres, langues ou encore SHS. 

→ Piège de cristal. L’un des membres d’une équipe de chercheurs déployée dans une base sud-africaine située en Antarctique aurait agressé physiquement l’un de ses collègues et proféré des menaces de mort à l’égard d’un autre, rapporte France Info. Les autorités ont été prévenues mais un problème reste de taille : du fait des conditions météorologiques, l’équipe pourrait être coincée sur place pendant dix mois encore.

→ Condamnation. Opposé à l’offensive militaire de la Russie en Ukraine, l’historien russe Alexandre Skobov accusé d’apologie du terrorisme a été condamné à seize ans de prison par le tribunal moscovite ↯, rapporte Le Monde.

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GOGUENARD EN CUISINE

Et pour finir…


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