🍀 Vous réagissez, on le publie



21 janvier 2022 | La recherche et ses pratiques
Still got
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Les flamants vous saluent. C’est sous le soleil montpelliérain que je rédige cet édito. En vacances ? Non, en immersion dans un labo ! Souvenez-vous, nous avions accueilli la chercheuse Camille Risi à TheMetaNews en octobre dernier.
Vis ma vie. Dans le cadre de l’Ă©change journaliste-chercheur de l’AJSPI, avec le soutien du ministère de la Recherche, je termine (dĂ©jĂ ) ma semaine au sein du laboratoire Hydrosciences Montpellier, encadrĂ©e par la gĂ©ochimiste ElĂ©onore Resongles.
Haut en couleur. Du prĂ©lèvement d’Ă©chantillons dans une rivière polluĂ©e Ă  l’arsenic Ă  proximitĂ© d’une ancienne mine, Ă  l’analyse par des instruments grands comme une pièce en passant par une salle blanche, j’ai eu le plaisir d’accompagner ces chercheurs tous terrains.
On ne perd pas le Nord. Sans oublier évidemment de les interroger sur leur quotidien, autant de discussions qui nourriront des papiers à découvrir dans notre nouveau site, qui sera mis en ligne au printemps !

A très vite,
Lucile de TMN

 PS.  Le livre d’Adèle Combes fait grand bruit : nous avions Ă©tĂ© parmi les premiers Ă  l’interviewer dans cet Ă©pisode de Rendez-vous avec Matilda.


Ils nous ont Ă©crit
  • Anne Chauvet-Louchet tĂ©moigne sur les financements europĂ©ens
  • Pascale Gerbail et Rym Ibrahim rĂ©agissent aux doctorants « fainĂ©ants » (selon certains)
  • Nicolas Giret Ă©crit suite aux annonces du CNRS sur l’Ă©valuation “open” des chercheurs
  • Des infos en passant
  • Votre revue de presse express
  • Et pour finir en direct des Tonga



Environ 5 minutes Ă  partir d’ici



Au taquet de l’actualitĂ© gĂ©opolitique ?

Anne Chauvet-Louchet est chargée de recherche au CNRS ; elle témoigne au sujet du Brexit et des financements européens.
« Je voulais rĂ©agir Ă  votre interview sur le Brexit et la science car il se trouve que nous venons d’ĂŞtre informĂ©s que notre projet EIC Pathfinder soumis en mai 2021, associant trois pays (France, Espagne et Suisse) Ă©tait inĂ©ligible. La raison Ă©tant que la Suisse ne fait plus partie des pays associĂ©s Ă  l’UE. Je passerai sur notre dĂ©ception et notre impression d’avoir encore bossĂ© pour rien… Le fait que la dĂ©cision soit rĂ©troactive Ă  tous les appels Ă  projet de 2021 est un coup bas pour la recherche. Et pourtant j’entends dĂ©jĂ  dire autour de moi : « Vous auriez pu vous en douter ! ». Donc, en plus de rĂ©diger des projets, des rapports, des demandes de financement, des Ă©valuations, de la formation des jeunes, et accessoirement de faire un peu de science, on s’attend aussi Ă  ce que je sois au taquet de l’actualitĂ© gĂ©opolitique ? Je suis perplexe. »


Encadrement : La compĂ©tence scientifique n’est pas suffisante

« Il est pour le moins surprenant qu’un directeur de thèse puisse Ă©crire “je propose un contrat CDD (type ingĂ©nieur) de trois ans avec engagement de rĂ©sultats pour le candidat, et qui peut ĂŞtre interrompu Ă  tout moment (avec justification, bien sĂ»r) par le directeur si le travail n’est pas satisfaisant” sachant que, comme son nom l’indique, le propre d’un CDD est que sa durĂ©e est convenue en amont et qu’il ne peut ĂŞtre interrompu qu’exceptionnellement et dans des cas très prĂ©cis encadrĂ©s par la loi. Quant Ă  envisager de faire rembourser des salaires Ă  des doctorants qui ne donneraient pas satisfaction, cela nĂ©cessiterait de rĂ©Ă©crire le droit du travail !
La compĂ©tence scientifique n’est pas suffisante pour encadrer des personnes. Encadrer cela s’apprend et doit s’accompagner de la prise de conscience que, dans l’organisation normale du travail, c’est l’encadrant qui est responsable des rĂ©sultats des gens qu’il encadre et ce d’autant plus qu’un doctorant est en apprentissage du mĂ©tier de chercheur. Si certains encadrants semblent espĂ©rer que des apprentis produisent les rĂ©sultats Ă  leur place sans avoir besoin de consacrer du temps Ă  les accompagner, c’est peut-ĂŞtre qu’ils n’ont pas Ă©tĂ© formĂ©s et manquent de compĂ©tences pour rĂ©aliser leur mission d’encadrement.
Des fiches permettant de sensibiliser les encadrants de thèse Ă  cette mission – qui dĂ©passe les compĂ©tences scientifiques – ont Ă©tĂ© rĂ©digĂ©es conjointement par deux associations, l’Andes et la CJC et sont Ă  la disposition de l’ensemble des acteurs du doctorat (dans le cas qui nous occupe, les fiches 11 et 20 paraissent très utiles). »


Doctorat : de quelle dévalorisation parle-t-on ?

Rym Ibrahim est ingĂ©nieure de recherche Ă  l’universitĂ© Aix-Marseille et rĂ©agit Ă©galement Ă  Ă  la rĂ©action d’un de nos lecteurs suite Ă  notre numĂ©ro sur la dure vie des directeurs de thèse.
« Je passerai sur la confusion “Ă©tudiant” / “doctorant”, et sur le qualificatif pĂ©joratif de “thĂ©sard” dans le texte, assez habituelle malheureusement mais qui ne m’Ă©tonne pas de la part de l’auteur d’une telle proposition. J’ai Ă©tĂ© assez choquĂ©e par la proposition qui y est dĂ©crite. Celle de renommer le contrat doctoral en contrat d’ingĂ©nieur, qu’on assortira Ă  un droit — pour le directeur de thèse — de vie ou de mort du contrat.
D’une part, cela entraĂ®nerait une confusion des rĂ´les et des rapports hiĂ©rarchiques entre le doctorant et son directeur de thèse. Le second est supposĂ© accompagner le premier dans son apprentissage du mĂ©tier (et dans le dĂ©cryptage de ses règles du jeu) et non lui imposer un certain nombre de tâches Ă  exĂ©cuter comme l’impliquerait un simple contrat d’ingĂ©nieur.
D’autre part, soumettre la poursuite d’un contrat Ă  la satisfaction du directeur de thèse, deviendrait un moyen de pression supplĂ©mentaire inacceptable vis-Ă -vis du doctorant qui assume dĂ©jĂ  le poids d’un grand nombre d’incertitudes dans l’exercice de son travail et vis-Ă -vis de son avenir. Et puis ce serait nier la distribution des responsabilitĂ©s dans l’Ă©chec d’une thèse, entre celles du doctorant (et des alĂ©as Ă©ventuels qu’il peut rencontrer en parallèle de sa vie professionnelle), de l’encadrant, des organisations dans lesquelles s’inscrivent la thèse et de l’institution.Cela dit, il est peut-ĂŞtre difficile d’attendre de la part d’un encadrant qui trouve les rĂ©unions de comitĂ© de suivi chronophages (que dire alors de l’encadrement d’une thèse), qu’il assume sa responsabilitĂ© partielle dans l’Ă©chec d’une thèse.
Que je sache, nous parlons bien de recherche et je ne connais pas encore d’instance dans la recherche qui permette de licencier un chercheur pour “travail insatisfaisant”, c’est-Ă -dire hors constat d’insuffisance professionnelle ou faute grave.
Enfin, j’ai aussi lu avec stupeur dans cette rĂ©action que l’obtention d’une thèse après trois ans serait une simple formalitĂ© qui entraĂ®nerait la dĂ©valorisation du diplĂ´me de doctorat. Mais donnons directement le diplĂ´me aux masterants, puisque c’est le cas ! Je serais aussi très intĂ©ressĂ©e Ă  comprendre de quelle dĂ©valorisation il est fait mention. Par les chercheurs et enseignants-chercheurs eux-mĂŞmes ? Sur quels critères ? Des critères bibliomĂ©triques ? Mais dans ce cas lĂ  supprimons le doctorat et n’ouvrons des postes que sur la base de critères de publication. A moins qu’on ne parle ici de la dĂ©valorisation du doctorat en France par les acteurs du monde socio-Ă©conomique ? Mais je ne crois pas que la simple formalitĂ© de l’obtention d’un diplĂ´me de docteur entre dans leurs critères d’apprĂ©ciation et dans leur système de reprĂ©sentation. »


Science ouverte & Ă©valuation : juste de la com’ ?

Nicolas Giret est chargĂ© de recherche au CNRS et travaille Ă  l’Institut des Neurosciences Paris-Saclay. Il nous a Ă©crit suite Ă  notre numĂ©ro sur l’évaluation des chercheurs CNRS.
« Petite rĂ©action sur les “nouvelles” modalitĂ©s de recrutement au CNRS : c’est bien beau de changer ces modalitĂ©s, mais avec la rĂ©duction drastique du nombre de postes et la volontĂ© encore plus affichĂ©e de vouloir supprimer le CNRS (pour le remplacer en agence de moyen, voir le rapport de la Cour des Comptes), je me demande si finalement tout ça n’est pas juste de la com’ pour les quelques dernières annĂ©es oĂą des postes en nombre ridicule sont encore proposĂ©s au concours. En tout Ă©tat de cause, je ne vois pas trop comment rĂ©duire la liste de production scientifique Ă  dix Ă©lĂ©ments permet de limiter le recrutement sur la base du h-index Ă©tant donnĂ© qu’on se doute bien que les membres du jury chercheront l’ensemble des publis des candidats et que ces dernier·e·s en toute logique les mettront en avant dans leurs rapports sur les travaux antĂ©rieurs et dans leur projet. »


Vous voulez réagir ? On vous lira

 Des infos en passant  Appel à candidature de l’Ademe pour des financements de thèse, ouvert jusqu’au 5 avril //////// C’est dans l’air du temps, une étude britannique s’est penché sur la santé mentale des doctorants et conclut que les institutions ont leur rôle à jouer pour améliorer la situation //////// 


//////// Presque 2500 copies ont été corrigées gratuitement au dernier semestre, selon un premier bilan de l’équipe de “Précarités de l’ESR mobilisées”. L’enquête est toujours en cours //////// Vous aussi voulez voir plus de femmes lauréates du prix Nobel ? Alors qu’une pièce de théâtre est consacrée aux “Nobelles” jamais reconnues, la bioinformaticienne Alice C. McHardy a déjà fait sa sélection de chercheuses à nominer ////////


Votre revue de presse express



Et pour finir…
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Cette petite expérience filmée au ralenti avec un aimant et de la limaille de fer montre à quoi ressemble un champ magnétique IRL.